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27 février 2007 2 27 /02 /février /2007 12:04

Les Secrets de Saint Roch

 

   J’ai fermé les volets, les rideaux sont tirés. Dans la cheminée les cendres ont été retirées, et l’âtre nettoyé. Le moulin, cette maison de campagne où il y eut fêtes et rires, parfois des pleurs, où il y eu de soleil et de la neige, vit ses derniers instants, Bientôt de nouveaux propriétaires vont le  ressuscité. Je ne reviendrai que pour signer les papiers officialisant la vente, l’acte de décès en quelques sortes. Les déménageurs viendront prendre les restes, le mobilier allant au garde meuble. La page sera définitivement tournée. Comme des dernières traces de cet instant de vie, la coupure de l’eau, de l’électricité dont la modernisation avait coûté si chère et du gaz apporteront demain leur coup de grâce. Comme un malade le corps principal, la grande bâtisse sera débranchée. Les derniers craquements de plancher marquent les sanglots des pièces désormais laissées presque vides.

Dehors les grands peupliers balancent les bras pour un ultime au revoir. A leur pied la rivière, court d’eau de fin d’été, humblement s’écoule en respectant presque le silence.

 

Je pensais tout connaître de ce vieux moulin à eau, de son parc, de son ruisseau. La demeure au long de ces quelques années de ludique collaboration m’avait offert tous ses petits secrets dans ses recoins cachés. Les endroits, où l’on peut surprendre les poissons, rencontrer l’écureuil et les oiseaux. Les lieux où la lumière joue discrètement avec les arbres et ouvre une porte dérobée en un clin d’oeil complice sur la vie et la faune. Je pensai tout connaître de ces pièces qui à notre première rencontre m’avaient semblées si nombreuses et si grandes. J’avais visité et dormis dans ses six chambres, profité de ses deux salles de bain, couru, jouer et étudié dans ces salons. Mais il y a deux semaines cette vieille complice me fit son dernier cadeau. Dans un ultime geste pour me retenir et ne pas rompre.

La statuette de saint Roch, que je n’avais jamais touché, était restée protégée dans son alcôve par une espèce de grille. La clé qui l’ouvrait avait réapparu dans le fond d’un tiroir de la grande pièce quelques jours après mon arrivée. J’avais décidé de bouger la représentation du saint des voyageurs pour la débarrasser de ses toiles d’araignées et de la poussière que le plumeau ne parvenait plus à atteindre. Je déposais le personnage d’une manufacture peut remarquable et entrepris le ménage. Il fut rapide mais alors que je m’attachais au nettoyage de la mosaïque qui en tapissait le fond, je fis tomber un carreau. Pour le rattraper avant qu’il ne se brise, je renversais également la statuette. Le socle s’ouvrit, me réveilla un papier plier en quatre, jauni par le temps et une petite clé. Le morceau d’émaille me cachait un petit orifice, une minuscule serrure.

 

Le papier était un message à l’attention des voyageurs sur le départ, une prière ou un au revoir.

 

« Toi qui va quitter cette demeure

Toi qui y vit tes dernières heures

Tu respectas et aimas ce lieu,

Trouve derrière ce Saint son adieu.

 

Depuis la construction de cette demeure

Peu trouvèrent cette cachette et sa mémoire.

Ces quelques voyageurs ont eut l’honneur

De laisser un peu de leur propre histoire.

 

Les souvenirs sont parfois douloureux

Pour voyager loin il faut être heureux.

Laisse au Saint pleures et chagrins

 

Dans sa cachette il en prendra soin.

La maison te laisse lire et partir

Mais laisse ici sa mémoire sans la trahir. »

 

La clé avait roulé quel que part, il me fallait la retrouver. Je soulevais les tapis, regardais entre les lattes clouées au sol. Je la trouvais entre les planches de escalier qui menait au premier étage. Enlevant les clous, elle gisait parmi la poussière et des restes de cartes postales. Celles -ci représentaient le moulin à différentes époques. On pouvait y voir les différentes étapes de sa construction, l’arrivée du Saint.

 

En septembre 1985 mon père acquit une maison de campagne dans le Berry. Il faisait un retour aux sources. Ses parents étant originaires de la Creuse, il était à la recherche d’une maison, d’un moulin qui lui rappellerait son enfance et ses pèches miraculeuses. Un jour qu’il nous expliquait la technique pour tendre des cordes, il nous racconta une histoire. Il avait attrapé une anguille si grande que, lasser de tirer sur le corps du poisson pour le faire entrer dans la barque, il le coupa en deux et rentra. Le lendemain un ami vint lui rendre visite. Mon père lui décrit son aventure. Cet ami à la fin de l’histoire fit un grand sourire et se dit rassuré. Il venait d’attraper l’autre moitié. On fait toujours confiance en ce que nous content nos héros, j’ai cru cette fable un certain nombre d’années.

Il lui fallait donc une rivière, à ma mère un jardin et pour nous un terrain de jeu. L’harmonie fut trouvée au bas d’une colline où siégeait une bâtisse rectangulaire, deux dépendances dont une avec deux boxes pour des chevaux, deux bras de rivière et deux champs dont un avec une grange. Sous un préau dormait depuis certainement longtemps une vieille carriole à chevaux. Son réveille n’était pas prèt de sonner ses énormes roues en bois servant de portails. Les chevaux eux aussi avaient disparu et la paille dans la grange nous aurait fait un excellent terrain de jeu si les guêpes n’y avaient pas fait leur nid.

Le corps principal semblait avoir été construit en plusieurs étapes. Les pièces sertissant la roue paraissaient avoir presque deux siècles. D’autres pièces furent construites pour abriter le meunier. Aujourd’hui encore les chambres principales occupaient cet espace et les mécanismes et sa meule avaient été remplacés par une cuve à fuel. Plus tard ce qui devint la cuisine et la salle à manger fut rajouté.

Au deuxième étage se trouvait une immense salle aux pavés noires et blancs. La cheminé pouvait contenir des bûches en réserve de près d’un mètre cinquante et laisser suffisamment de place, dans le foyer, pour griller un cochon de taille raisonnable ou un mouton à la broche. Un soufflet de maréchale ferrant d’un mètre de large et de deux de long, attisait le feu. Sa chambre à aire devait avoir été faite dans la peau d’une vache entière. Nous pûmes accueillir dans cette salle soixante dix personnes assises pour une fête.

En dehors de cette pièce il y avait deux chambres, une salle de bain et une cuisine contenant un lit, des armoires, une table transpercée par un pilier. On pouvait y déjeuner à vingt sans problème. Enfin une mezzanine couronnait le plafond. D’un côté il y avait un lit que nous voulûmes occuper et en face un billard français avec tout le matériel. Nous passâmes un temps certain autour du tapis vert mais jamais l’un d'entre nous n’osa occuper le lit. Les murs, le toit craquent constamment. La nuit les fantômes envahissaient l’espace. Le sommeil était impossible avant les premiers rayons de soleil.

Nous avons rapidement fait connaissance avec les différentes salles. Le parc restait à découvrir. La rivière et le bief créaient une île magique. Les roseaux ondulaient au grès des vents et dessinaient des danses mystiques sur les eaux. Les rayons de lumières parmi les feuilles découvraient une vie riche et surprenante. Anguilles, poissons de toute sorte habitaient le lieu. Les rats gondins avaient construit des hlm tout les long des rives. Après la roue le courant se faisait plus discipliné. Les algues d’un vert hypnotique ondulaient calmement. J’ai vite pris l’habitude de les regarder se mouvoir, à l’abri de deux bosquets de noisetiers. Parfois des truites rompaient cette cérémonie apaisante.

Les premiers travaux apparurent l’été suivant. Le potager fut retourné et remplacé par une pelouse qui, ont l’espérait, deviendrait l’équivalant de certains espaces verts britanniques. Quelques vieux êtres furent également coupés. Ils devenaient dangereux pour la toiture neuve. Enfin, ont profita du niveau bas de la rivière pour couper complètement le courant et la draguer. Une motte de terre fit barrage au niveau de la petite île et l’on attendit l’assèchement. La vieille roue fut également remplacée. Un ami de la famille devait faire abattre des chênes. Le bois fut envoyé chez un charpentier qui oeuvra magnifiquement.

Mon travail consistait à vérifier le mur soutenant le pont devant la roue. Je grattais la mousse, enlevait le ciment pourri et le remplaçais. C’était un travail intéressant parce qu’il se faisait à l’ombre et au frais. C’est un avantage certain en été. Il offrait également une vision particulière de la rivière, du moulin et de sa roue et des poissons prisonniers des flaques d’eau. Pour rompre la monotonie du grattage j’en attrapais un ou deux pours les mettre de l’autre côté de la roue ou l’eau avait creusé et restait plus profonde. De cette place et proche de la fenêtre donnant sur la roue je pouvait voir l’escalier où, sans que je le sache, la clé avait roulée.

 

Je repris la clé, redressai les clous, et fixai sans trop de marque les planches de l’escalier. Au préalable le images furent mise dans une boîte métallique et replacées dans la cavité des marches.

La clé ouvrit, non sans un cri de rouille réticente, la porte de mosaïque et me laissa découvrir pelle melle, en plus de la poussière, des photos et des papiers, papiers tamponnés à l’allure officiel et du courrier. Je trouvais également une paire de gants noirs et un blanc ainsi qu’un collier d’appareil photo. Il résidait dans cette cachette quelques vieilles photos en noire et blanc. Le blanc était plus tôt jaune en faite. Elles témoignaient de jours heureux passées dans cette demeure. Des mariages et des anniversaires y avaient été célébrés. Les images de personnes seules montraient un noir obscur notamment dans leurs vêtements. Leur visage semblait gris et fatigué. Les yeux, leur regard appelaient la lumière des jours de fêtes mais ne recevait que de l’ombre d’une grande solitude ou d’une grande tristesse. Ils étaient perdus fixant le vide de l’objectif.

Je pu déterminer trois tas différents de photos et presque autant pour le courrier en fonction des noms et des signatures. La plus ancienne pile datait du début du vingtième siècle. Le minotier possédait quelques vaches. Son épouse créât cette cache pour protéger le souvenir de son mari parti sur le front. C’est également elle qui avait apparemment écrit le message. Une lettre griffonnée en hâte sur un bout de papier avait dû prendre l’eau. Des traces de pluie empêchaient une lecture fluide et quelques mots manquaient. L’époux avait envoyé des indications pour la bonne tenue de la roue et du mécanisme servant à moudre le grain. La lettre s’achevait par « Si je ne reviens pas arrête la roue, vend tout et va chez ma mère » Ypres le 21 avril 1915.

Sur la deuxième feuille la femme expliquait que son départ étant imminent cette cache deviendrait une espèce de sanctuaire à l’usage de l’oubli. Tel était le sens de premier message découvert hors de coffre. Ainsi avait-elle laissé la missive de l’armée Française que beaucoup de veuves reçurent jusqu’au 11 novembre 1918. Le document officiel était daté du 23 avril 1915. Derrière une photo était écrit « Veille du départ 18 janvier 1919 ». La femme était en noir. Sa main gantée de la même couleur tenait un enfant de 5 ou 6 ans.

 

Le deuxième groupe se composait de nombreux courriers échangés sur probablement cing ans. Il y avait trois photos qui se rattachaient assez bien avec ces textes. Une famille avec un fils unique et un couple puis une femme seule encore en noir. D’après les papiers, l’homme avait acheté la maison pour sa femme. Il lui avait construit la grande pièce pour des réceptions. Lui ne venait que pour et pendant la chasse. C’est à l’occasion d’une de ces visites que la photo de famille fut prise. Le jeune homme au milieu devait être le fils. Le garçon regardait l’objectif avec un air peu enjoué. Il avait certainement du le forcer un peu pour le faire poser. L’homme, le père, regardait son fils avec le regard de celui qui va en demander beaucoup parce que très optimiste pour son avenir. Avec un peu de chance le fils aura suivit son destin, sans, il sera devenu médecin ou aura repris l’affaire familiale. Pour le moment l’uniforme le disposait à une carrière militaire très précoce ou à une école privée, une pension. La femme regardait soit le fils d’un air inquiet soit l’époux d’un air mécontent. La qualité approximative du photographe ou un incident parvenu au moment du développement avait rendu flou son visage. Peut-être avait-elle tout simplement tourné la tête au mauvais moment. Aucune date n’était inscrite au verso des images.

La correspondance semblait indiquer une certaine inquiétude de la part du mari pour sa femme. Celle–ci semblait montrer une lassitude permanente ce qui avait poussé l’homme à l’envoyer à la campagne pour organiser sa vie autour d’une production de farine locale, loin de la ville ou pour mener une vie de bourgeoisie provinciale.

La dernière lettre était celle d’un avocat stipulant les accords finaux d’un divorce. Elle gardait le moulin, percevait un dédommagement parce qu’il reconnaissait ses tords. En accord avec l’avocat de la partie adverse, le désormais ex-mari rachetait les parts de l’usine qu’elle détenait. Cela devait lui garantir un niveau de vie suffisant pour refaire sa vie.

Ce que je ne comprenais était cette troisième photo. Je la classais à la même époque à cause des bâtiments du fonds. Elle était collée légèrement de travers sur une feuille un peu trop grande. Un rayon de soleil qui traversa un nuage et la fenêtre démontra qu’un texte était derrière. Le temps passé avait collé l’image à la lettre à qui trouverait la cachette. La photo représentait la femme sur départ. Elle se remariait avec un ami d’enfance. Il était ingénieur et partaient tous les deux pour Mururoa. Les voisins avaient sa nouvelle adresse à l’attention du fils qui n’avait pas donné signe de vie depuis quatre ans, depuis le divorce. C’était le 24 juin 1968, elle bloquât définitivement la roue.

 

Les derniers souvenirs concernait un homme qui voulu quitter le monde des affaires ou tout du moins celui de l’entreprise et de la ville. Il s’était marié jeune avait eu un enfant. Des voyages l’avaient emmené au quatre coins de la terre, un nombre impressionnant de photos en témoignait. Mais de sa fille il ne posséda qu’une photo d’elle petite. La seule trace de la présence du voyageur au moulin était celle d’un vieil homme barbu, sur un ban à côté de la roue. Cette dernière semblait déjà dans un état de fragilité importante. Quelques pales manquaient à son râtelier, la chaîne la bloquant était déjà bien rouillée. Chose amusante, il portait la petite clé autour du cou. La photo portait l’écriture d’un texte explicatif succin. L’homme avait misé sur l’argent et le pouvoir toute sa vie. Mais à la fin de celle-ci, il s’aperçu que la véritable valeur, capable de passer le trou noir de la tombe était l’amour. Le seul qui lui restait était celui de sa fille qu’il n’avait pas revue depuis plusieurs années. Sa femme avait fuit avec elle pendant une de ses expéditions ou un de ses voyages d’affaire interminable. Divorcé rapidement elle avait décidé de rompre totalement avec cet homme. La photo fut prise par sa fille qu’il venait de retrouver. Tous deux s’étaient assis sur ce même banc. Ils s’étaient expliqués et surtout s’étaient retrouvés. Deux jours plus tard le vieil homme pris d’une violente migraine s’endormit. La jeune fille raconte qu’un sourire merveilleux inondait de vie le visage de son père. Elle refermait les secrets de Saint Roch suite à la cérémonie et emmenait la dépouille de son père retrouvé avec elle. Elle laissait les images, ses rêves de retrouvailles et n’emportait que les souvenirs de cette discussion sur le banc. Elle partait en reportage au Viêt Nam. Février 1966.

J’avais balayé presqu’un siècle d’histoire, d’histoires discrètes de famille et d’amour. Des amours perdus, d’autres qui naissent et d’amour retrouvés. Le saint des voyageurs surveillait ce petit trésor et protégeait peut-être encore ces personnes en voyage.

Il semble que nous cherchions tous un amour. Certain espère éternellement un grand amour, celui des comptes de fée. Mais il est un rêve et comme tout rêve idéal. Le véritable amour ne se rencontre que lorsqu’on l’a oublié. Certains ont la chance cependant de le vivre au quotidien parce que n’attendant plus rien ils l’ont trouvé. Pour d’autres c’est l’amour filial, le plus naturel et peut être le plus difficile. Nous ne connaissons malheureusement ce qu’il est vraiment que lorsqu’il s’éloigne. C’est un apprentissage redoutable auquel on ne peut ni ne doit échapper.

 

Pour ne pas interrompre la chaîne je finis ce soir et avant mon départ de rassembler quelques photos et des papiers. Des articles de journaux justifiant mon départ et quelques poèmes. Un jour futur quelqu’un trahissant le secret osera peut-être les publier. Je joins quelques photos, photos de fête, photos de famille avec mes parents et une de leur enterrement. Pour sauvegarder l’ensemble j’ai tout scanner et mis sur un disque laser. J’ai reposé les originaux qui finiront peut-être en poussière. Le tout a pris place dans une caisse et j’ai renfermé l’ensemble dans l’alcôve, replacé tout les gants et le collier, la clé et la lettre sous le socle du saint comme les autres les laissèrent. L’objet était un bout de corde avec lequel nous péchions, et une clé de voiture qui ne servira jamais plus.

La clé qui ouvra la grille et donne accès au premier secret, à la lettre de 1919 était depuis deux jours dans le tiroir où je l’avais trouvé. J’ai voulu ce matin jeter un dernier coup d’oeil à ces histoires. Elle n’y était plus.

 

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21 décembre 2006 4 21 /12 /décembre /2006 08:56
Je vous invite à lire la première partie pour que vous puissiez comprendre ce qui suit.

LES HOMMES B.I.C. partie 2


Elle remplit soigneusement sa fiche comme lors de ses nombreux examens, et réalisa les prélèvements. Une question demeura difficile à résoudre. Combien de cheveux laisser au sein de la société. D?un côté et malgré toutes les garanties, elle s?inquiéta à l?idée que cette souche d?ADN resta en liberté. De l?autre quel nombre de cheveux pouvait-elle laisser ? Il n?y avait qu?une seule prise possible et il n?était pas aisé de définir un nombre idéal de compagnons. Elle utilisa néanmoins l?option doute. Cette option résidait dans le faite que nombre de femmes avaient trouvé comme quasi impossible la détermination de ce nombre. Comment connaître le nombre de week-end, de jours de vacances et surtout d?amants avant d?arrêter ou de s?arrêter à un partenaire. Aujourd?hui on parlait plus d?un occupant dans ses temps libres. Le choix était donc laisser à la machine de prélèvement et à son algorithme. Une seule chose était certaine, le nombre de cheveux était compris entre un et mille. Pour plus de simplicité et de rationalité, la limite maximale avait été réduite par décret de loi à 250. Quelques une des premières femmes qui avaient utilisé cette option s?étaient retrouvées avec une moitié de crane mise à nue.

L?opération terminé, Borso réapparu un bref instant pour la remercier, lui donner les dernières informations sur la méthode et le fonctionnement. Dès qu?elle en aurait l?envie, elle n?aurait qu?à envoyer un mail avec son code. Elle préciserait le lieu et la date de rendez vous pour la livraison du produit. 24h était nécessaire pour la bonne marche du processus. Raccourcir ce délai était un  argument commercial pour la concurrence mais un fiasco. Le spécimen implosait avant la date limite, voir de manière inopportune. Certaines femmes restèrent quelque peu frustrées et le prirent très mal. L?argument commercial était quelque peu tombé à l?eau.

 

Thaliae rentra chez elle. Le temps avait passé plus rapidement qu?elle ne l?avait cru. Elle s?engouffra dans le métro un peu moins rempli que dans les jours de semaine. Rentrée chez elle, elle essaya de se concentrer sur son travail mais garda un goût amer. Sa matinée la laissait perplexe. Avait-elle bien fait ? Cet investissement lui serait il rentable. ? Que se passerait ?il si elle venait à être découverte par une rivale ? Elle accrocha son esprit à des problématiques simples et rapides à résoudre pour se lancer dans les véritables charges de travail. Elle ne s?arrêta qu?à la nuit tombée.

La livraison automatique avait permis de faire un plein dans le réfrigérateur et les différents placards. Elle n?eut que l?embarra du choix. Ce fut une omelette salade et un grand coup d?eau de javel sur tout ce qui avait servi. Elle prépara ses affaires pour ses déplacements de la semaine. La valise prête ainsi que les différents billets d?avion elle se prépara au sommeil. Avant d?éteindre son ordinateur elle relut ses mails.

Le temps passa et Thaliae réussit à se faire à l'existence de son dossier au sein de la société B.I.C.. Elle laissa passé du temps et par un après midi de début septembre elle reçu un mail. Le produit commandé quelques moi plus tôt était opérationnel. Elle pouvait en demander la livraison selon sa convenance. Le message était suffisamment discret pour passer inaperçu au milieu des messages de livraison via internet et assez précis pour que seule l?intéressée puisse comprendre. Elle accusa réception et renvoya sa décision au soir.

 

 

De retour chez elle, elle ne changea pas ses habitudes. Après une douche rapide elle passa des vêtements plus léger, brancha son portable et le connecta sur le réseau. Le message réapparu. Elle régla rapidement ses quelques taches, messages et confirmations de décisions et revint vers la l?avertissement.

Elle le relut, valida la provenance pour être certaine de ne pas faire d?erreur. Par la fenêtre quelques étoiles scintillaient au-delà des lumières de la ville. La lune dans ses premiers quartiers éliminait les autres. Du haut de son appartement qui dominait un maigre parc les ombres des arbres rescapés ressemblaient à de lourds rochers. La base des bâtiments plongés dans les ténèbres n?offrait presque aucune vision du sol. Ce vide la désola. Rien ne bougeait dans son entourage et ainsi peut-être était sa vie. Elle replongea regard vers l?écran.

Elle consulta son agenda. Le mois s?annonçait pour une fois sans trop de rendez-vous éloignés aux quatre coins de la planète. Dans le message était placé un mot que lui avait donné son contact. Elle devait le retourné, c'est-à-dire l?écrire à l?envers et renvoyer le message à son expéditeur. Un message d?excuse lui était immédiatement envoyé lequel lui servait de clé pour accéder à une page de bienvenue. Elle devait entrer son mot de passe dans une case choisie lors de la commande pour accéder à la page de lancement de production d?une unité. Le rendez-vous et le lieu furent fixés dans la foulé.

Elle se décida le lendemain pour le vendredi soir. Un rendez-vous sur les quais lui paru l?idéal. A ses yeux, cela possédait un semblant de romantisme presque antique pour une entrevue avec un homme presque inconnu.

Les deux jours passèrent avec un surcout de travail. Elle dû se libérer suffisamment de temps pour profiter pleinement de sa soirée. Elle prétexta un rendez-vous le jour même vers 16h. Cela lui laissa la latitude pour passer chez son manucure et son coiffeur. Elle passa également rapidement chez l?esthéticien. N?ayant pas pu s?occuper d?elle véritablement depuis plusieurs mois elle se sentit revivre. Comment elle expliquerait ces changements au bureau devinrent la cadet de ses soucis alors qu?elle passait une robe noire et souple. Elle enfila une paire de chaussure à talon, remplit son sac de quelques ustensiles essentiels : carte de crédit, rouge à lèvre, cigarettes et briquet. Elle se regarda une dernière fois dans son miroir, prit une grande bouffée d?air. Ce qu?elle voyait dans la grande vitre l?étonna. Elle n?avait pas mis cette robe depuis longtemps - la fin de ses études peut-être ou la soirée de sa dernière promotion ? elle ne se rappelait plus. Le passé c?est le passé se dit-elle, il faut toujours regarder devant. Oui toujours devant se répéta t-elle. Elle prit ses clés et claqua sa porte. Une voiture l?attendait en bas de chez elle noyée dans l?ombre.

Je l?avais croisée ce soir là alors que je remontai chez moi. Elle m?adressa un regard timide et confus comme une petite fille ayant été prise en flagrant délit. Elle rentra très tard je pense car je ne l?entendis pas remonter dans l?escalier. J?imagine sa première rencontre. Un homme l?attendait au pied d?un des arbres des berges. Habillé dans un costume noir, peut-être avec un bouquet de fleurs dans les mains, il devait attirer les regards des passants. Il était devenu tellement rare de voire un homme attendre une femme dans une évidente démarche de séduction. Je me demande néanmoins quelle fut la première phrase qu?il prononça. C?est toujours important la première phrase. Il dû en trouver une bien pour que la nuit se soit prolongée ainsi. Ils ont dû marcher un peu au bord de l?eau puis trouver un restaurant. Selon le budget définit lors de la création du dossier, ils seront allés dans un bon restaurant. Apéritif et vin pendant le repas furent certainement consommés. Cela lui permettait de se détendre véritablement sans pour autant la souler complètement. Le repas achevé, ils repartirent dans une autre direction. La voiture les récupéra plus loin et les ramena jusqu?à l?appartement peut-être. Passèrent-ils tout de suite par la case hôtel ou celle de sa chambre à coucher. Je ne sais pas.

Le samedi elle se leva un peu plus tard que d?habitude et ne prit le chemin de son bureau que vers 10h. Le ciel était dégager et déjà un peu frais. Elle avait un sourire léger et en coin repensant peut-être à sa soirée et à cet homme qu?elle avait rencontré. Elle avait d?ailleurs oublié pendant la soirée, pendant l?espace de quelques instants, que ce n?était pas un véritable être humain mais un homme BIC. Est-ce possible qu?il fut si réel, qu?il puisse connaitre tant de choses, qu?il semblait avoir vécu tant d?expériences pour ne vivre que 24h ? Je pense que c?est à ce moment là que chaque femme ayant fait appel à ce service devenait accro. Elle ce fut pire et incontrôlable.

 

Elle ne reprit pas contact avec la société tout de suite. Elle laissa l?expérience intégrer son esprit petit à petit. Dans le mois de septembre elle ne s?autorisa qu?une soirée. Le mois de novembre fut un peu plus festif, elle fit appel deux fois à la société de service. Ses traits s?étaient pendant ce mois moins creusés que d?habitude pour une personne de son âge et de sa fonction. Son sourire était devenu un peu plus systématique et sa démarche un peu plus assurée. Toujours nerveuse, elle semblait néanmoins s?être un peu détendue. Décembre arriva très vite et avec lui le simulacre de fêtes de fin d?année qui ne trouvaient d?intérêt que dans les primes et les cocktails servant de préambule à d?éventuelles mutations ou promotions. Elle sortit trois fois. Prit-elle son homme B.I.C. sous le bras pour faire bien lors des soirées ou prit-elle le parti d?y aller seule pour marquer son indépendance, je ne peux le dire.

Elle partit en vacances quelques jours en janvier et revint pleine d?énergie. Elle s?autorisa un dîner rapide chez moi à son retour. Ses réserves étaient vides du simple fait qu?elle avait suspendu ses livraisons. Son esprit était clairement ailleurs et ne resta pas longtemps. La reprise c?est dur, me dit elle. Il ne faudrait jamais partir.

Janvier et février se passa avec acharnement. Avait-elle oublié ses réserves de décompression, cherchait-elle à confirmer ses chances de progression dans la société ? Difficile de la dire mais il est certain que quelqu?un devait lui suspendre une carotte devant son nez. Les soirs et les week-ends furent laborieux. Mars lui tendit les bras et elle ouvra les siens deux fois. Son compagnon d?un soir vint la chercher trois fois. Les lendemains elle prit même le temps d?une grasse matinée et traina en robe de chambre jusqu?à 11h. Elle sauta néanmoins dans un habit de travail jusqu'au soir. C?est là probablement qu?elle perdit pied.

En très peu de temps son train de vie explosa ne dormant que quelques heures seulement. Elle ne rentrait presque que pour se changer après une rapide toilette. Elle alternait sortie et travail. Au début elle semblait comme poussée par une énergie intarissable. Elle souriait sans cesse, courait dans tous les sens, riait et reprit le sport en salle. Entre chaque voyage elle s?organisa plusieurs soirées dans la même semaine.

 


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24 novembre 2006 5 24 /11 /novembre /2006 19:11

Pour autant que je me souvienne de cette histoire, elle se déroula avant que l’armée allemande n’envahisse la zone dite libre, avant 1942. Le nom des lieux se jouent de ma mémoire, mais je sais que cette histoire est véritable. Les yeux de celui qui me la racconta étaient des plus sincères qui soient. Assis devant moi dans un restaurant il répondait avec discrétion aux invitations de ses vieux camarades de classe. Je ne vais pas souler la jeunesse avec mes vieille histoire avait-il dit. Tout cela c’est du passé. Je vous en pris avais-je répondu. Je suis curieux d’entendre cette fameuse histoire. Bien dit-il voilà.

 

La ville était éteinte évitant ainsi de servir de repère aux raides alliés. La préfecture avait fermé ses portes, comme chaque jour à 17h30. Le préfet s’était lui assoupi vers 21h, après le repas. Plus aucune lumière n’avait réchauffé le bâtiment après 22h. Seuls les bruits de quelques bottes, celles des patrouilles allemandes, perturbaient le silence de deuil, instauré depuis déjà deux ans.

La gare de Chalon-sur-Saône était déserte. La nuit avait couvert de son manteau d’immobilité les quais et les machines. Seules deux masses noires, deux locomotives mises sous pression en fin de journée et le baraquement du chef de gare annonçaient une probable activité matinale. Une faible lumière traversait la petite fenêtre de sa guérite. Sur le mur était déjà inscrit les horaires des premiers trains. A 6h 30 les deux convois devaient emmener leurs wagons lourdement chargés l’un vers l’Allemagne l’autre vers le front Russe.

Par la pénombre engloutie, longeant les deux masses noires, deux formes quasi fantomatiques hantaient seules le quai. Une lumières faible fit échos à la lune. Le chef de gare passa la tête par sa fenêtre. Il scruta dans la peine ombre, les yeux tirés et mis clos. Comme rien ne bougeait, il s’en retourna à ses occupations. Moins de dix minutes plus tard, la ville ressuscita brusquement dans un éclair. Deux détonations retentirent, deux éclaires provenant des quais éclaboussèrent la gare, puis plus rien.

 

Une voiture de la Kommandantur fit irruption dans la cour de l‘établissement de l’état provisoire. Un sous officier en sortit comme poursuivit par le diable. Il monta d’un bon les quelques marches de la préfecture. Moins de deux minutes plus tard, il ressortait pour s’engouffra de nouveau dans le véhicule noir. Il portait l’uniforme de SS. Ses bottes étaient particulièrement bien cirées, son habit noir impeccable même pour une heure si matinale. Une timide lueur du jour perçait à peine la ligne d’horizon.

 

Le préfet avait été certainement surpris par cet homme au saut du lit. Tant pis pour son café dû t-il se dire. Il sortit à pas tranquille, sans trop se presser. C’était l’attitude d’un homme économisant son énergie ou tout simplement encore endormi. Il monta dans son véhicule de fonction garée la veille contre le mur de la cour, sous la fenêtre de son bureau. Lorsqu’il arriva à la gare, une activité peu normale régnait. Des camions de l’armée allemande, un cordon de sécurité filtrait les entrées des voyageurs. Ces derniers devaient freiner l’anxiété due à la peur du retard. Les valises étaient fouillées, les papiers minutieusement examinés. A l’intérieur de la station, un cordon de militaires en arme écartait les curieux autour des carcasses calcinées des deux machines. Un acte terroriste avait détruit les deux locomotives, bloqué les voies, empêcher l’acheminement dans les temps des cargaisons et surtout rendu fou furieux les officiers de l’armée occupante. Comme seule trace, signature ou justification de l’acte, une croix à deux barres horizontales peinte et surmontant un V, coulait dans le repli d’un mur.

La résistance, ou des terroristes selon l’occupant, les avaient fait tout exploser au milieu de la nuit sans faire, heureusement de victimes. Il fallait déblayer les voies, faire venir deux nouvelles locomotives, les remettre en chauffe avant de pouvoir repartir. Cela prendrait des jours.

 

Dans la cabane du chef de gare, la Gestapo et le sous officier SS menaient déjà un interrogatoire forcé au près de responsable de la nuit. Le préfet entra. Le sous officier le présenta au responsable de la police allemande. Ce dernier tentait péniblement de comprendre comment il fut possible que ces deux engins explosent sans que personne, ni le chef de gare, ni les patrouilles de nuits n’aient pu voir, entendre quoi que ce fut. Ces deux trains bloqués étaient une épine pour lui et surtout pour son avancement, Paris ou Berlin peut-être si tout allait bien. Pour le moment le front Russe se rapprochait dangereusement. Cela le rendait encore plus nerveux et violent. L’individu était dans une rage proche de la folie et près à fusiller le pauvre chef de gare pour collaboration avec des terroristes simplement par ignorance.

Pour faire mine de participer et d’aider le camp adverse le capitaine de gendarmerie, également présent s’emmêla. Il interrogea à son tour l’homme de gare agar.

- « Mais vous avez bien dû voir quelque chose, des ombres, des personnes inhabituelles, entendre un bruit. »

- « J’ai bien entendu quelque chose mais quand j’ai passé la tête par la fenêtre j’ai point vu quoi que ce soit. Peut être deux ombres ou deux silhouettes j’sais pas, j’suis pas sûr. Il fait trop noir dans c’te foutu gare la nuit. Puis ch’uis tout seule qu’est-ce que j’aurais bien pu faire. »

- « Ces deux ombres ou ces deux silhouettes avaient bien une forme, une taille, quelque chose de particulier ? »

L’officier allemand sembla se détendre. Il y avait là peut-être un début de piste Il préféra laisser l’officier français poursuivre. Le préfet n’avait encore rien dit.

 

- « Y’avait peut-être un grand pis un p’tit mais je ne suis pas sûr. Enfin y’faisaient pas la même taille. » continua le chef de gare.

- « Commençons par le grand, - dit le gendarme - il était grand comment ? Vous ne pouvez pas décrire sa silhouette ? sa démarche ? il y avait bien quelque chose de particulier qui ait retenu votre attention ! »

- « Ben non - réplica l’homme.- Tout ce que je peux vous dire c’est qu’il y avait un grand pis un plus p’tit. »

- « Il était grand comment ? » Insista le préfet.

- « Ba j’sais pas. Il était plus grand que moi. C’est pas bien difficile me direz-vous. Il était grand à peu de chose près comme vous, Monsieur le préfet. A vrai dire c’était à peu de chose votre silhouette »

 

Il y eu un blanc, le préfet le devint certainement lui aussi, ravala sa salive. Le gendarme ne prêta pas attention aux réactions et continua l’interrogatoire. Le capitaine passa sur la description du plus petit et très vite se tourna vers l’homme de la gestapo d’un air impuissant et lui céda la place. Deux heures plus tard le chef de gare partait pour la kommandantur afin de poursuivre l’interrogatoire. Le préfet et le capitaine de gendarmerie suivirent mais jusqu’à leur automobile. Chacun retourna à ses occupations.

 

En Juin 1944 la radio de Londres annonça le sanglot long des violons et de l’ombre surgirent les fameux terroristes en pleine lumière. Un groupe de FFI, dirigé par un homme répondant au grade de lieutenant reçu l’ordre de se rendre à la préfecture. Le commandant en chef de la résistance au niveau régional les attendait pour prendre les ordres d’arrestation. Retrouvez XJ-27 et le représentant du gouvernement de la France libre pour recevoir vos ordres d’actions et d’arrestations.

- « Tant mieux » dit l’un d’entre eux à l’attention du lieutenant.

- « Comme cela on n’aura pas beaucoup de chemin à faire pour arrêter le préfet et ce foutu capitaine de la gendarmerie. Je parie qu’on va les trouver ensemble. »

Les quelques hommes sautèrent dans leur véhicules et se frayèrent un chemin parmi les débris des combats de rue. Il ne restait plus que quelques poches de résistance allemande. Quelque coups de feu claquaient encore au loin laissant place peu à peu aux « vive la France, Vive le générale ».

 

La préfecture ressemblait encore à un camp retranché. Des sacs de sable avaient été posés en hâte aux points faibles et devant la grande porte, sur un tas une mitrailleuse lourde gardait l’accès à la court. Un groupe de FTP avait pris position. Les voitures se stoppèrent, furent contrôlées puis eurent libre à la place. Les résistants en sautèrent comme l’officier SS quelques mois plus tôt. Ils montèrent eux aussi quatre à quatre les marches. Une double porte du premier étage sur laquelle « bureau du préfet » était écrit, était gardé par deux hommes en armes sans uniforme et trois parachutistes apparemment britanniques. Dans la tête du résistant il dû se passer un certain nombre de choses pendant que les cerbères validaient les ordres de mission et les identités. Un premier vigile frappa et entra. Il ferma la porte derrière lui. Cela permis au petit groupe de reprendre son souffle et d’ajuster leur vêtement. Le plus gradé des parachutistes leur fit signe de laisser leurs armes à l’entrée. Cela ne leur plut pas mais il fallait obtempérer dit le lieutenant. Le vigile revint

- Vous allez pouvoir entrer dès que les officiers anglais et américains auront en finit avec eux.

- J’espère qu’ils ne les amochent pas trop. Faudrait pas qu’il ne nous gâche le plaisir. Dit un homme derrière le lieutenant.

- Pardon ? dit le vigile

Alors que l’homme allait préciser sa pensée la porte s’ouvrit. Quatre soldats apparurent. Les trois parachutistes de faction se mirent immédiatement au garde à vous. Les soldats français de garde en firent de même. Les hommes du lieutenant se contentèrent de libérer le passage. Les résistants restèrent silencieux à leur passage découvrant les mines fatiguées et les uniformes presque impeccables.

Une voix retentit de derrière la porte qui s’était refermée.

- Soldat, ils peuvent entrer.

 

Le lieutenant regarda rapidement ses hommes, tira sur son blouson pour l’ajuster à sa taille. Dans un souffle il revisita les formules de présentation de son commando. La porte s’ouvrir, il avança d’un pas décidé. Son regard balaya rapidement la pièce et s’arrêta sur deux hommes de dos en uniforme d’officiers de l’armée française. Ils portaient en plus sur le bras le fanion à la croix de lorraine des F.F.I. ils étaient tous les deux penchés sur une liste et sur des cartes d’état major. Alors que la porte venait de se refermer sur le groupe, le lieutenant, au garde à vous et au salut de rigueur allait commencer sa litanie de présentation avec fierté.

- Ne vous emmerdez pas avec les phrases de rigueurs dont tout le monde se fout. Nous devons faire vite. Je sais qui vous êtes puisque c’est moi qui vous ai fait venir.

La voix venait de l’homme situé à droite.

- A vos ordres Mon colonel ! répondit le jeune homme.

Les deux officiers se retournèrent. Le lieutenant sembla s’étouffer et ses yeux auraient bien pu sortir de leurs orbites. Les autres francs tireurs poussèrent un ho !, alors que le jeune officier laissa échapper un « nom de dieu » claironnant. Ils avaient devant eux le capitaine de gendarmerie et le préfet qu’ils voulaient arrêter pour collaboration.

Le préfet eut un sourire en coin. Ce n’était visiblement pas les premiers à se faire avoir. La raison pour laquelle les armes leur avaient été confisquées avant d’entrée prenait également toute sa valeur. Quelqu’un d’un peu nerveux aurait pu les mettre en joue ou faire feu.

Le colonel leur expliqua les différentes péripéties qui l’avaient amené à prendre le poste de préfet à la demande même de la résistance. Il avait fuit à Londres mais avait dû revenir très peu de temps après pour prendre le poste de préfet auquel il venait d’être nommé en 1939. Ceci lui avait permis d’agir presque en toute tranquillité, d’être au premier poste pour soutirer des informations parfois stratégiques. A ce niveau son grade de colonel était tout récent mais consentit pour les actions menées et obtenu au premier pas de l’armée alliée sur les plages de Normandie. Il transmit les informations nécessaires pour faire accélérer les préparatifs d’arrivée du gros des troupes et les arrestations prévues. Le commando s’en alla presque aussitôt. Lorsqu’ils sortirent les deux plantons leur rendirent leurs armes avec un large sourire.

 

En racontant cette histoire quelque 50 ans après, le préfet semblait revivre encore ce passage de sa vie. Il m’avoua également que la réflexion du chef de gare comparant sa silhouette à celle du soit disant terroriste l’avait décontenancé. Le capitaine avait particulièrement bien joué son rôle sur ce coup là. Ce qu’il ne s’explique pas c’est comment le chef de gare avait pu voir cette forme et pourquoi il n’avait pas déterminé un autre profile plus évident. C’est vrai, le capitaine était plus reconnaissable que lui. Après tout c’est lui qui portait les explosifs ce soir là. C’était peut-être le sac qu’il portait qui avait modifié sa stature.

Après cet épisode, il partit à Berlin comme représentant militaire de la France. C’est là qu’il prit la plus belle cuite de sa vie me dit il. Il avait inspecté les troupes françaises. Un apéritif lui fut servit ensuite au mess des officiers. Son aide de camp le conduisit chez les américain où il suivit le même cérémonial mais au bourbon. Arrivé chez les russes ensuite sa mémoire commençait à faire défaut et il ne se souvient plus de rien de ce qu’il fit chez les anglais. Comment il sortit de cette partie de la ville pour rentrer dans la zone française reste une énigme. C’est son chauffeur qu’il l’avait porté et couché.

Après avoir rit de cette anecdote le vieil homme se leva. Sa femme le suivi et prenant tous les deux congés de leur groupe de vieux camarades, il sortir du restaurant. Je ne les revis jamais.

 

 

 

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6 novembre 2006 1 06 /11 /novembre /2006 11:54

Si les vieux parlent

 

Les vieux parlent et ce que leurs yeux mystérieux semblent dire est bien plus que ce qu’ils racontent.

J’ai rencontré un certain nombre de personnes âgées. Certains avaient plus de 90 ans. Au premier abord leurs yeux sont tous identiques, ridés et mi-clos comme éblouis par une lumière. C’est peut-être celle d’une sagesse née d’une vie de lutte, d’amour, de plaisirs, et de tristesses partagées entre folie et raison.

J’ai rencontré un certain nombre de ces personnes et si peu en réalité. Pour ceux aux facultés encore intactes, leurs discours possèdent un calme similaire à celui qui regarde une pleine. Ils semblaient tous comme attendant quelque chose. Un rendez-vous avait été pris, peut-être, de longue date. L’ombre des certitudes plane dans leurs attitudes alors qu’ils regardent la vie, les gents les événements en spectateurs. Ils s’étonnent, s’énervent, s’enthousiasment pour des faits, des situations, des décisions politiques. Voulant se raccrocher, s’encrer encore un instant dans la réalité quotidienne, ils proposent des solutions : Si j’avais ton âge je ferais cela, si le gouvernement me laissait faire, je réglerais le problème ou la situation en deux jours à peine. Ils parlent au passé : « de mon temps cela n’aurait jamais été possible. » Cette phrase laisse alors deux possibilités : soit c’est un progrès envié soit ils considèrent ce fait comme une erreur. Le gouvernement laxiste ou corrompu, peu fiable, qui n’a rien compris et ne comprendra jamais rien, ne fait que des « conneries ». La mémoire du Général est alors sollicitée.

Pour quelqu’un de vingt ans, toute la vie est devant lui. A leurs yeux, la fameuse jeunesse ne comprend pas grand chose et cela est expliqué par un regret : « La vie est trop facile, avant il fallait travailler dès que possible, certains se sont bâtis des fortunes mais ils ont travaillé dur pour cela et pendant des années. Vous voulez tout de suite. Un salaire de ministre, 35 h par mois, la retraite à 50 ans, une belle maison, un jardin et vous ne pensez qu’aux vacances. » Si certains réussissent dans ces nouveaux marchés, les vieux que je croise s’étonnent que je n’aie pas encore fait fortune en profitant du filon ou ne soit pas déjà en retraie ou chef de mon entreprise, d’une multinationale.

Ce qui me passionne le plus chez ces personnes, un peu bizarre, c’est leur calme, leur semblant de recul des choses de ce monde. Leurs paroles font d’eux des voyageurs en attente ou les rendent semblable à de vieux animaux sauvages, jamais domptés et pouvant à l’occasion encore mordre. Ce que j’aime le plus au travers de ces voiles, c’est leur mémoire.

 

La mémoire des autres

Ou un déjeuner d’été

 

   La nature de mon enfance est faite de collines vertes et boisées annonçant déjà l’esprit montagneux des Vosges. Les routes et les rivières serpentes, se suivent, se cherchent pour nous emmener dans des lieux secrets, surprenants, humbles et discrets. Pour celui qui sait regarder et surtout voir, pour celui qui sait écouter et sentir, pour celui la seulement, la nature se révèle. Les couleurs doucement l’envahissent caressant le paysage d’un halo d’émeraude à la fois doux et profond. Une respiration, une brise légère dépose des parfums de terre, d’herbes, de fleurs sauvages et de feuilles, de bosquets et de bois riches de vie. L’été, les champs s’enflamment en des senteurs de bouquets délicats et apaisants. Les oiseaux, les rapaces, les biches et d’autres animaux plus beaux les uns que les autres entament leurs chants de vie. C’est un petit coin de paradis qui peu à peu disparaît tronçonné, découpé par les routes, envahi par les touristes aveugles.

 

En trente ans j’ai vu disparaître impuissant, l’Avalon de mon grand-père. J’ai vu évanouir avec la sécurité de l’enfance mes terrains de jeu, de guerres et de chasse aux escargots. Avec eux, la mémoire des vieux, qui me regardaient les yeux emplis d’espoir pour les générations futures, s’efface peu à peu. Que va t-on devenir sans leur vie passée emplie d’erreurs salvatrices, de joies et de souffrances ? Qui pourra décrire ce qu’ils ont vu, ce pays merveilleux où j’étudiais des choses passionnantes avec le meilleur des professeurs ? Qui pourra bientôt emmener son petit-fils pour lui apprendre à lire la nature ?

 

Dans la campagne de mon enfance deux fleuves prennent leur source et chaqu’un choisi sa route. L’un va vers le sud, vers le soleil, les vignes et l’autre s’enfuit à l’Ouest vers Paris, les blés, l’orge et le maïs. Ma campagne possède tout de ce que ces deux eaux emportent. Elle se suffit à elle-même et discrètement survie sans trop se faire connaître. Langres, comme un monstre immobile surveillait la campagne depuis des siècles. En 1900 la petite cité comptait prêt 4 000 habitants et quelques 117 cafés, bars, et autres débits de boissons. J’imagine que dés vieux murs ont pouvait voir à perte de vue successions de champs et de bois, quelques bâtisses tapis dans l’ombre, le couvent des Ursulines et les quatre lacs. Quelques routes invitaient l’esprit aux voyages. D’un côté celle menant à Chaumont, Troyes puis à Paris, de l’autre Strasbourg puis l’Allemagne. Depuis l’invasion romaine ses routes étaient certainement satisfaites de leur tracé et n’avaient pas changé.


 

 

A l’extérieur de la ville, un écrin de feuilles encercle le dôme soutenant la statue d’or de Notre Dame. Elle fait face aux remparts vieux de plusieurs siècles, aux tours massives et grossière devenues hôpital, pigeonnier militaire, ruines, puis finalement maisons ou cabinets privés. Langres se dresse fièrement à la vue du voyageur. Dans peu de temps il passera la grande porte qui le sépare du calme, de la fraicheur et d’un repos bien mérité.

 

   Depuis des siècles, voir des millénaires cette vue s’est révélée aux pèlerins, aux passagers en route vers l’Alsace, la Bourgogne, la Champagne et ce avant même que ces régions ne soient appelées ainsi. Les romains s’installèrent en nombre sur cette colline. Les Gaulois cultivaient les champs aux allant-tour avant leur arrivée. D’autres encore, avant eux certainement, péchèrent dans les rivières à proximité mais ne laissèrent que peu de traces.

Les murs d’enceintes furent construits à partir du XIIème siècle. De ceux qui précédèrent, il ne reste pas grand chose si ce n’est la porte romaine datant du IIème siècle de notre ère. Il est difficile d’imaginer le paysage qui bordait les constructions. Je rêve d’une grande forêt s’étendant à perte de vu. Quelques champs ou prairies, peut-être, l’éclairaient ça et là. Des animaux domestiques devaient pêtrent nonchalamment et l’on apercevait des cerfs, des sangliers et autres animaux sauvages.

   Aujourd’hui il y a des maisons qui envahissent le paysage. Les champs se lient à elle par des bosquets d’arbres. La forêt recule et fuit derrière les collines. Mon grand-père protégea et a entretenu une parcelle de cette forêt, lègue de son père, pendant 50 ans. Il y a quelques chênes, des frênes, des hêtres, des bouleaux. Petits nous faisions un jeu : celui de reconnaître les essences de bois, de champignons, d’oiseaux aux milieux de ces majestueux piliers. C’était une chapelle et la plus belle qui soit. Nous faisions notre catéchisme écologique et la communion était faite d’une eau fraiche et d’un gouté de tarte aux pommes.

 

 


Grand père George

 

La rentrée 1922

 

La première cloche sonne la rentrée des élèves du collège Diderot. La rue du même nom, qui avait repris pour un instant les bruits d’une activité normale, retourne au calme estival. Le soleil étire ses derniers rayons d’été. Les étudiants retiennent dans leurs souvenirs, un moment encore, leurs vacances. Bientôt ils devront attendre la récréation. On ne bavarde pas dans la classe du maître. Les 40 élèves, tels de futurs soldats déjà bien disciplinés se mettent en rang. Au premier regard de l’instituteur, ils entrent en silence et regagnent leur place abandonnée deux mois plus tôt.

 

Les élèves, devenus pour beaucoup des hommes trop tôt, avaient vu leurs vacances laborieuses par le travail des champs. La vie reprenait ses droits et comblait peu à peu les absences inventées par la guerre. L’été 1922 continuait à soigner les plaies dans un souffle de paix. Même si l’Allemagne demandait un moratoire, on pouvait croire qu’il ne devrait plus avoir de guerre. Une telle moisson d’âmes ne pouvait avoir court de nouveau sans que l’humanité ne perde un peu plus la sienne. Avec les blés les monuments saluant les sacrifices poussaient. Les commémorations allaient bon train. Les gueules cassées essayaient de vivre.

 

Les élèves se préparaient à de nouveaux cours. Math et français, géographie et surtout histoire qui s’était enrichie de nouveaux chapitres. Ce qui est pratique avec la petite cité c’est que l’histoire y est omniprésente. Des romains à nos jours les travaux pratiques trouvent leur place sur les murs des maisons et dans la campagne environnante. Les élèves de dix ou onze ans s’apprêtaient au certificat d’étude. Le travail allait être long et difficile, mais seul le résultat comptait leur dit l’enseignant. Les plumiers, les encriers et les tabliers existaient encore tout comme la discipline, le respect et une certaine idée de la France. Ils étaient une vingtaine d’élèves en ce mois de septembre 1922. La promotion 1922 allait connaître d’autres évènements encore plus troublants. Comme un bateau pris dans la tempête, les vagues de la vie emporteraient certains équipiers. Parmi ces moussaillons se trouvait grand père George.

 

J’ai retrouvé, au hasard d’un été les quelques survivants de cette rentrée de 1922. Ce fut pendant l’été 1993. Ils n’étaient plus que 7 que la vie n’avait pas encore réussi à séparer. Ils n’étaient plus que 7 en 70 ans d’existence. Tous se retrouvaient régulièrement comme pour faire fasse aux affronts du temps et de l’histoire. Ils arrivèrent un par un, certains encore accompagnés de leur épouse.

Chaque nouvel arrivant faisait une tentative d’entrée discrète. Il était accueilli comme un chef victorieux. Un survivant de plus revenait chargé d’histoire. Lui avait le regard de quelqu’un qui se réveille. Un peu vague, frappé de lumière, il retrouvait le jour et ses amis. C’était leur bouffée d’air. Ils attendirent un moment avant de se mettre à table pour l’apéritif. Attendaient-ils un miracle, un ressuscité ? Je lisais dans leurs attitudes et leur regard qu’ils étaient au courant de leur nombre exact parce que maintenant habituel. Certains demandèrent néanmoins des nouvelles de certains absents.

 

-   « Tu as réussi à joindre un tel ? Que devient l’autre ? »

-   « Il est à l’hôpital, il ne va pas très fort. Il enterrait un copain de régiment ou pour simple réponse : L’invitation m’a été retournée par sa fille. » Et changeant de sujet dans l’espoir de conjurer le sort ou de laisser planer l’hypothèse d’une vie toujours présente :

-   « Tiens ! Tu es venu avec un de tes petits-fils ? Et s’adressant à moi en guise de bonjour. »

-   « Tu risques de t’ennuyer jeune home avec des croulants de notre âge. Nous passons notre temps à ressasser de vieilles histoires. »

-   « Cela doit en faire un paquet à raconter vous croyez que vous aurez assez de temps ? Je veux dire pendant le déjeuner bien sûr. »

La réponse fut un regard en coin souligné par un sourire et un appel à l’apéritif. Les convives s’installèrent plus ou moins loin de leur épouse respective. Je pris une place laissée vacante à proximité de mon grand père alors qu’un serveur enlevait les assiettes laissées à l’abandon. Elles n’espéraient plus personne.

Je me suis retrouvé face à un homme portant bonne allure et belle figure délicatement soulignée d’une fine moustache grise qui malgré un regard un peu triste posait sur moi des yeux à la fois curieux et timides. Les autres l’appelaient soit par son prénom soit par le diminutif de « Monsieur le préfet passe-moi le pain s’il te plait ! »

Cet homme pris sur soi de savoir qui j’étais. Chose peu aisée pour quelqu’un qui semble être descendu du train de la vie. Les progrès, les études d’aujourd’hui sont des informations qu’ils font mine de ne pas pouvoir ou vouloir comprendre. En retour de politesse et pour ne pas laisser de silence s’installer, je l’interrogeai plus ou moins délicatement sur sa vie. Il finit par raconter une parie de son histoire, les passages qui l’avait le plus marqués.

Grand père George enrichit l’histoire de quelques dates, précisions sur les lieux et les personnages. Dans mon esprit s’animait un film en noir et blanc inspiré par l’armée des ombres. Traction avant déchirant la nuit, hommes en noir faisaient fasse à d’autre en uniforme SS ou en imperméable de cuir. Le chapeau était de rigueur quel que fut le camp. Le sang lui était le même. L’homme revivait ses épisodes avec détachement. Un écho amer s’entendait dans sa voix comme un arrière goût de regret. Emporté par l’histoire, ses brillantes études d’avant guerre, il avait finit préfet et haut gradé de l’armée française. Envoyé à Berlin, il avait pour mission d’inspecter les troupes françaises et de rendre visite aux autres camps. Les plus belles cuites de sa vie me dit il. L’échange s’enrichit des vies des autres. George fut le dernier à parler. Il ne dit presque rien. Rien que je ne sus déjà. Rien d’autre que ce qu’il écrivit quelques années plus tard. Les Diables Rouge, sa promenade à travers la France et la débâcle, sa démobilisation. Il passa sur ce soir où traversant un village en ruine il pu trouver un abri dans une maison et se sustenter d’un lapin abandonné dans un clapier. Il répéta souvent, je n’ai jamais eu fin et conclus par je ne me suis soulé qu’une fois. Je dû attendre quelques années pour en connaître l’occasion et m’empresser de l’oublier.

 

 

Il fut appelé sous les drapeaux le 1er septembre 1939 alors que son service militaire avait commencé près d’un an plus tôt le 24 du même mois.

 

Le premier septembre 1939 la caserne Turenne de langres l’accueillit au 14 CID (Centre d’Instruction Divisionnaire) et il fut successivement chauffeur du commandant de la place, le Colonel Carré, puis planton à la sous-préfecture de Langres. Il conduisit un jour le sous-préfet chez un dénommé Perfetti qui fut d’après ces souvenirs ministre pendant une dizaine de jours, tel fut tout du moins son titre. Enfin, avec un de ses camarades, un certain Maurice M., il fut nommé chauffeur de M. Fernandel, qui déjà à l’époque était un comédien célèbre. Quel tallent avait –il me disait mon grand père. Mais plutôt que de parodier sa mémoire je le laisserai s’exprimer.

 

Voilà ce qu’il nota :

 

« Nous allions le chercher à l’hôtel de L’Europe chaque jour Maurice et moi. Il avait créé un « foyer du soldat » et à plusieurs reprises nous l’avons emmené quêter chez les commerçants de la ville. Devant l’attraction qu’il suscitait, ce qui provoquait un rassemblement de badauds et de militaires, je l’entraînais au café de ma mère et c’est dans la cuisine, devant un « Ricard » que l’on terminait la Tournée. Un jour, il fut réformé par un jury de militaires et de médecins. Mesure que j’ai approuvé, estimant que la personnalité et le talent de cet acteur vedette servirait plus la patrie à l’intérieur du pays plutôt qu’aux frontières dans un régiment du génie.

Arrive maintenant le moi de décembre, et devant l’offensive Allemande et les pertes subies par nos troupes, le commandant fît appel aux réserves et c’est ainsi que le 26 décembre 1939 le départ pour la Lorraine fut annoncé.

Je n’ai pas cherché à me cramponner à Langres, soit auprès du Commandant ou auprès du sous préfet. D’autant plus que le directeur du Crédit Lyonnais, M. S, était intervenu auprès du Colonel. J’étais obligé d’aller y travailler un jour par semaine à mon fort déplaisir.

Nous ne connaissions pas notre destination, mais la radio avait annoncé sur les ondes «  bonne chance à la 14ème Division qui monte à Dieuze. Pour ma part et avec quelques camarades Thénnail, Barbotte, Cipette, Rousselle, nous nous retrouvions à Wahl Les Benestroff, dans la neige, le froid. Il faisait –25 ou –30°. Trois mois passèrent sans voir la couleur de la terre.

On m’a désigné pour suivre des cours d’études des gaz asphyxiants (moi qui n’ai pas beaucoup de nez et dont la consommation de cigarettes réduit encore les aptitudes) et j’ai plusieurs fois fait le déplacement à Bénestroff, siège de la division De Lattre De Tassigny.

Courant avril 40, repos à Luneville. Le 10 mai, alerte. Les allemands ont envahi la Belgique et le Luxembourg et poursuivent vers le sud leur offensive. Nous montons en renfort à Rethel. Je suis affecté à la 9ème compagnie du 152ème R.I., prestigieux régiment d’active entre tous, qui avait été décoré en 14-18 de la croix de guerre et légion d’honneur avec insigne « les diables rouges ».

Présenté au lieutenant commandant la compagnie, je me déclarai pupille de la nation – fils de tué en 1914 et qu’il devait me réserver légalement une place parmi les moins exposées. Il m’a répondu que dans le secteur il n’y avait pas de place privilégiée. Il m’interrogea ensuite sur ma profession de démarcheur pour une banque et conclu que je devais être débrouillard. Je fus affecté en tant que caporal comptable au bureau de la compagnie.

Là mon travail se bornait à envoyer aux familles des mandats quand les hommes avaient touché leur prêt. Nous étions au courant, par le commandant des évènements touchant à la guerre. C’est ainsi qu’un jour, j’eus la surprise d’apprendre que l’on signalait la présence de troupes ennemies à Rouen. Le lieutenant me proposa de décrocher avec le convoi hippomobile. J’acceptais naturellement. Mon équipement consistait en un fusil modèle 1915 et 9 cartouches. J’ai tiré sur un avion allemand, mes munitions furent vite épuisées et jamais renouvelées.

1ère halte, dans un village abandonné, et installé à l’intérieur d’une maison, nous commençons à casser la croute quand les chars Allemands bombardent la zone. Départ précipité, j’ai qu’en même le réflexe de mettre un morceau de poulet dans ma poche. Nous traversons des villages en flammes ou en ruines. Curieusement seules les cheminées restent debout. Je crois que notre destination était Reims. Nous passons par Marmelon le Camp. Nous subissons, mélangés avec les civils des bombardements par l’aviation et les blindés.

Je me souviens qu’avec un autre soldat, nous nous étions mis sous un petit aqueduc et j’ai vu gicler les balles dans le ruisseau quasi au bout de mon nez. Nous n’empruntions que de petites routes, à la moindre côte nous marchions ou poussions. Quelques fois il fallu faire demi tour les allemands étaient devant. Nous n’arrivâmes jamais jusqu’à Reims.

Nous avons assisté à des duels aériens ainsi qu’à des tirs de D.C.A décevants. Alors que nous regardions défiler leur avions trois par trois nos batteries n’en touchaient pas un. Quelle déception.

Des jours et des jours à marcher. Je vois encore la route et les champs qui la bordaient. A un endroit nous vîmes des parachute à terre et des soldats français qui nous invitaient à les imiter et à attendre les colonnes allemandes pour ses rendre. Il s’agissait peut-être de la fameuse « 5ème colonne » ?

Vers Chatillon sur Seine, une camionnette des « diables rouges » nous croise et s’arrête à notre hauteur. Au cour d’un bombardement elle s’était retrouvée séparée des autres. Un réflexe me fit parler : « Chef, il n’y aurait pas une place pour moi dans votre véhicule ? » Il me répondit par l’affirmative en invitant également un cuisinier qu’il connaissait. Russier, mon dernier compagnon de route vint aussi. Aussitôt dit, aussi fait. Nous laissons notre barda dans la voiture à chevaux et en route ; pensant que les kilomètres seraient plus vite avalés avec notre mécanique qu’avec des chevaux qui accusaient beaucoup de fatigue. Ce convoi fut d’ailleurs pris par les Allemands quelques jours plus tard.

Un peu plus tard aux abords d’une route nationale nous regardâmes éberluer et incrédules le défilé des civils et militaires. Automobiles, charrettes, brouettes s’étalaient sur des kilomètres.

Nous arrivons à Beaune. Là un capitaine de notre régiment nous prend en charge avec des militaires de 152ème et nous fait monter dans un train. Russier et moi, le train étant complet, nous nous installons sur une guérite de serre-frein. Nous nous attachons avec nos ceintures à des tuyaux pour éviter de chuter au cas où nous nous endormions.

Le train roule, roule, et finalement nous dépose dans une ville illuminé comme en temps de paix. A notre grande surprise nous sommes à Lyon. Nous nous rendons au foyer de la gare et prenons un déjeuner. A un certain moment, retentit un appel des haut-parleurs de la gare destiné aux soldats d’infanterie. Une porte est indiquée et un sergent vient nous demander de suivre ce commandement. 2ème appel, j’arrête un soldat se rendant au lieu de rendez-vous. « Il paraît que nous allons reformer les bataillons pour stopper l’avancée Allemande ».

Me tournant vers Russier « crois-tu que l’on puisse les arrêter à Lyon ? » Sans attendre de réponse verbale nous voici repartie sur la route à pied mêlé aux civils et aux militaires. Quoi qu’il en soit notre équipement était resté dans la roulote, nos papiers avec. Une bétaillère nous permis de parcourir un bout de chemin tout en nous reposant, si ce n’est les narines à cause de la forte odeur laissé par les occupants précédant. Mon compagnon de route nous a guidés jusque dans un petit village ou résidait des parents à lui. Des avions ennemis passèrent au-dessus de nos têtes et marquèrent leur présence par un lâché de bombes créant un grand émoi chez les civils mais ne nous empêchèrent pas d’achever notre repas. Nous en avions affronté d’autres et nous nous sentions en sécurité dans la maison.

Alors de nouveau la route. Tandis que nous traversons à pied la ville du Puy (Loire), l’entends un appel. C’était notre chef comptable qui sirotait une boisson à la terrasse d’un café. Nous le rejoignons et je lui déclare : « Chef, nous vous avons retrouvé par hasard et maintenant nous ne nous quitterons plus ». Comme tout le monde, nous descendons vers le sud et nous  faisons halte à Carmaux entre l’Aveyron et le Tarn. Un chef porion (il y avait encore de mines de charbon qui fonctionnaient dans la région) s’offre de nous héberger. C’est là, le 16 juin 1940, que l’on eu connaissance de l’armistice signé par le maréchal Pétain. Quelques jours après, ayant appris que les restes de notre régiment séjournaient à Clermont-Ferrand, nous quittons Carmaux pour le massif central. J’y ai découvert une salle immense où étaient entreposées des quantités de caisses de mitraillettes soigneusement emballées. Dire que notre régiment, qui avait guerroyés dans la forêt de La Hart, réclamait en vain à l’état major la distribution de ce type d’arsenal pour répondre aux allemands.

Quand on fait l’inventaire des effectifs de la 9ème Cie qui comptait environ 160 hommes, nous n’étions plus que 5 ou 7. Seul le chef comptable, Russier, 2 ou 3 types et moi-même en avions réchappé. Quelles pertes ! Tous ne furent pas tués fort heureusement mais furent mis hors de combat ou prisonniers.

Nous avons fait à Clermont Ferrand une rentrée quasi triomphale. J’ai eu l’occasion de bavarder avec un Haut-Marnais. Un notaire qui m’apprit que lorsqu’il était passé à Langres « tout brulait ». En réalité, il y eu vraisemblablement un ou deux véhicules ou peut-être un dépôt de carburant. La ville n’avait pas souffert.

Quelques temps après les réservistes, dont je faisais partie durent quitter la ville et je me suis retrouvé dans un hameau de côté de Gergovie, avec un Alsacien, dont j’ai perdu le nom. Nous avons proposé nos services à un paysan, propriétaire de trois vaches et de quelques parcelles de terre. Il y avait un four communal utilisé par roulement entre les familles. Je me souviendrai toujours de ces miches de pain savoureux, cuites à point au feu de bois. Je n’en ai plus jamais mangé de cette qualité.

Nous ignorions totalement notre avenir. J’ai vu avec quelle facilité et quelle rapidité les Alsaciens étaient démobilisés. Il suffisait d’un papier d’une « Kommandantur » quelconque, présenté par un parent, un ami et immédiatement l’intéressé ramassait ses affaires et disparaissait. Je me rappelle en avoir mis un en garde, c’était trop beau. Alors que l’on ne savait pas si nous pourrions rentrer chez nous. Eux partaient tout de suite en Alsace. Je ne sais pas s’il savait que c’était pour changer d’uniforme et laisser leur vie en Russie ou ailleurs.

Ayant appris le partage de la France en 3 zones, l’interdite d’abord, l’occupé ensuite et enfin la zone libre, j’ai finalement été au bureau démobilisateur du Martres de Veyre (Puy de Dôme). Ils n’avaient à leur disposition qu’une carte de France d’un format 10/10 pour situer les différentes zones. Mais j’ai appris que la limite de la zone occupée était fixée sur le canal de la Marne à la Saône. Quelle joie !! J’allais pouvoir rentrer à Langres, retrouver ma femme, mon fils et ma mère.

Ma démobilisation eu lieu le 8 aout 1940 et revêtu d’un costume civil taillé dans un drap kaki des uniformes de l’armée, j’ai regagné ma ville natale par le train. Quelle émotion et que joie de voir se profiler « intact » depuis la gare les tours de la cathédrale.

Bref pour mon compte personnel, je n’ai vu les soldats Allemands que dans les gares qui nous séparaient de Langres. Hormis les avions qui nous avaient survolés lors de la débâcle. Dès le retour chez nous, je les ai vus quotidiennement car la kommandantur avait été installée à l’hôtel de ville, et certains soldats fréquentaient le café de ma mère pendant 4 ans. Un jour un homme en uniforme attira mon attention par une connaissance parfaite, quasi sans accent du français. « Ils sont venu me piquer à la légion » me répondit-il. Et ils, étaient ses camarades. »

 

Le déjeuner s’attarda jusqu’au milieu de l’après midi. La belle équipe, un peu éméchée, ne voulant pas se quitter, imagina un tour des lacs. Ce fut surtout les petits bars, guinguettes et autres établissements désaltérant qui les préoccupaient. Je ne pus les faire tous. Au deuxième, et malgré la meilleure volonté, je pris la voiture du grand père, sa traditionnelle Peugeot, pour me reposer au frais, à la maison. Les 7 compères attaquèrent courageusement et de face le troisième lac. La moyenne d’âge dépassait 80 ans et ils me parurent inusables.

Ils me saluèrent heureux peut-être d’avoir trouvé une paire d’oreilles qui ne connu pas leurs histoires. Fut-ce simplement la bienveillance de grands parents, ils étaient certainement fiers d’avoir tenu plus que moi, un gamin de 20 ans.

 

Je ne les revis jamais. Le grand homme surnommé « M. le préfet » mourut quelques années plus tard d’un cancer. Il avait au préalable tenté un dernier coup d’éclat par une tentative de suicide. Il ne résistait plus à la folie de sa femme et ne pouvait accepter le divorce. « On ne revient pas sur sa parole » avait-il dit. « Un engagement est un engagement quel qu’il soit ! En plus à mon âge… » La rupture d’anévrisme qui avait heurté sa femme réussit à l’emporter très peu de temps après lui. Les autres se sont tous éteints les uns après les autres dans le silence de mon grand père. Il me tendit un jour une feuille où je découvrais les noms des élèves de cette rentrée de la promotion 1922.

Il me dit « Tiens regarde, je suis, ici aussi, le dernier… »

 

 

Il n’y a plus personne aujourd’hui de cette promotion. Tous ont fait leur rentrée sous l’œil expert de Saint Pierre. Les cloches célestes ont sonnées le rassemblement. La classe est désormais au complet, là-haut.

Des soldats du 21ème seule 3 ont assisté a sa dernière grande balade. Ils étaient de dix ans plus jeunes.

 

 

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25 juillet 2006 2 25 /07 /juillet /2006 20:51



 


 


 


La grotte des deux jades




 


Il y a très longtemps, dans un milieu indéfinissable entre réalité et imagination, entre ce qui est et ce qui peut être, l’ordre immuable, immobile et le chaos, les dieux s’ennuyaient. Ils erraient entre sommeil et une faible activité de création. Cette sorte de sieste éternelle n’était perturbée que par le bruit de deux géants, deux dragons divins qui se querellaient sans cesse.

L’un d’entre eux était bleu. Ses écailles luisaient selon son humeur d’un rayonnement allant d’un bleu profond à un bleu d’une pureté presque transparente. Son nom était Uo ce qui pourrait se traduire « La raison profonde comme l’infinie ». Aujourd’hui encore ils utilisent l’idéogramme du cœur au-dessus de l’esprit.

Le deuxième dragon, identique au premier dans sa forme rayonnait de rouge. Ses écailles étaient comme des braises dans la nuit de cet espace infini sans étoile. Son nom était Richeel. Les peuples qui prirent place dans les grandes plaines de l’est, des éons plus tard, utilisèrent ce nom pour définir la passion, les pulsions venues du cœur. Les premiers hommes du peuple Celte se souvinrent de lui dans le prénom Rachelle.

Si Uo réfléchissait beaucoup avant d’agir, prenant en compte l’ensemble de tenants et aboutissants, les causes et les conséquences de ses actes, Richeel agissait avec impulsion. Il ne prenait en compte que l’instant présent, l’idée, l’envie de faire ou de ne pas faire pour agir. Ainsi naissaient leurs querelles incessantes poussées soit par les tentatives d’Uo pour raisonner son opposé, soit par Richeel pour l’inciter l’autre à mener une action sans qu’il puisse prendre le temps d’une réflexion dont la longueur du temps pourrait nous échapper.

Le panthéon divin se composait ainsi. Il y avait un dieu élu parmi les plus anciens. Sa tâche était alors d’organiser, de prévoir et de donner une direction à l’action des divinités. 9 autres dieux étaient également élus pour un poste et des actes déterminés. Parmi les 9 élus les deux premiers secondaient le grand élu pour aider à faire appliquer les décisions prises auprès des plus jeunes divinités. Les autres administraient, rythmaient, organisaient, ou gardaient les premières archives des décisions et actions prises. Les deux dragons ne faisaient pas partie de cette hiérarchie, ils étaient trop jeunes, peu expérimentés et ne cherchaient de toute façon qu’à influencer indirectement le comportement des autres divinités. Ceux-ci correspondaient toutes à ce que l’on nomme aujourd’hui un trait de caractère, une qualité ou un défaut. Les neuf élus étaient plus complexes car moins définissables. Le tout premier élu, en ce début de l’univers était le dieu de la création. Il prit la parole :

- « Nous ne pouvons continuer à errer sans but dans cet univers. Je suis le dieu de la création et ai participé à la réalisation de votre existence à tous. Nos pouvoirs, notre nombre est suffisant maintenant pour rendre concret nos aspirations à tous. Il est temps d’agir. Nous n’avons toujours pas répondu à une question. Cette fameuse question à la quelle nous réfléchissons depuis longtemps : que faisons nous là, pourquoi sommes nous ici et comment peut-on se rappeler le chemin qui nous y a amené ? Voici mon idée. »

Il expliqua alors aux 9 divinités son projet et tous acceptèrent. Ceci nécessitait, pour une réalisation parfaite, d’écarter les autres demis dieux ou sous divinités tel que les deux dragons pour ne pas détruire ou influencer le projet de façon inconsidérée. L’objectif était à priori simple pour eux : créer un univers tangible, un monde où tous pourraient voir la réalité de leur caractéristique propre.


Le dieu placé au deuxième plant à la gauche du dieu élu s’occupa de comptabiliser les donner, les énergies nécessaires. Celui à son opposé, à la droite apporta les bonifications : la lumière, l’aire, l’eau et tout ce qui était nécessaire pour créer un monde fertile. Les 2 plus proches, à la droite comme à la gauche, étaient chargés d’organiser les rituels, les méthodes pour rendre ce monde réel. Alors que les deux accesseurs du dieu de la création passaient des messages. Le neuvième, le plus éloigné, gardait la sécurité de leurs travaux à tous. Le travail avançait et les deux dragons ne soupçonnaient rien comme les autres déités. Bientôt un globe de terre allait être assemblé, cultivé et engendré. Des créatures apparurent mêlées de l’influence de chacune des divinités créatrices. Au moment de la création finale un sort fut jeté sur l’ensemble des dieux, divinités et autres éléments pour permettre la touche définitive à l’œuvre. L’univers était calme et une grande détonation survint. Une boule apparut et avec elle, dans cette explosion, une infinité de constellations. Le dieu de la matière et du feu avait réussit sa mission. Il avait concentré de microscopiques éléments en un tout. Il les avait concentré à un point tel, qu’en libérant son étreinte une explosion incroyable avait retentit. L’espace ainsi défini mais toujours en expansion avait initié ses mouvements internes. Des groupes de poussière formèrent des constellations et au milieu d’elle des soleils, des planètes et des lunes. Parmi cette multitude les dieux élus semèrent la vie sur certaines d’entre elles. L’objectif était de créer des êtres pouvant évoluer et leur permettre de comprendre à leur énigme.

Un univers entier était né alors que la plus part des dieux dormait. La plus part non, Richeel était partie poussé par une impulsion et Uo qui réfléchissait. Ils avaient échappé au sort de sommeil. A la vision d’une des nouvelles sphères, perdue dans cette nouvelle dimension inférieure, ils se précipitèrent. Deux lignes, une bleue et une rouge pénétrèrent avec fracas le ciel au dessus du monde nouvellement créé.

Leur course, leur poursuite dura un temps infini. Ils finirent par initier même un mouvement de rotation à cette planète. Ils brassèrent les éléments gazeux, leur souffle déclencha des zones de feu où la terre s’enflamma. Ils évaporèrent certaines masses d’eau créant les nuages. Avec le temps leur zone de lutte se rétrécit en une partie, laissant le reste à son refroidissement et à une certaine tranquillité. Des mouvements incessants sur ce lieu firent croitre une montagne tellement grande qu’elle défigura la sphère. C’était et de loin le point le plus éloigner du centre du globe. A cette vue, les deux dragons lutèrent pour en conquérir le sommet. Leur force était égale tout comme leur volonté. Ne pouvant réussir à maintenir plus d’un temps restreint l’étreinte de la cime, tous deux se précipitèrent vers la base pour la réduire à néant. Si l’un d’entre eux ne pouvait posséder ce monde, nul ne l’aurait. Uo avait estimé qu’il fallait trouver un point d’entente et réduire cette montagne aurait permis de pouvoir discuter. Richeel avait agit par colère et ne voyant pas de solution il s’était lancé à la destruction de la montagne. L’un pénétra la base par le sud et l’autre par le nord. Ils creusèrent deux entrées, deux tunnels. Une explosion retentie, la terre trembla sur ses bases. Ce grand fracas fit s’effondrer une partie de la montagne, puis le calme vint. Plus rien, le silence naquit enfin sur ce monde. Les dieux surveillèrent un temps pour les voir ressortir, les attraper et les éloigner de ce monde. Ils ne reparurent pas. Les deux grottes restèrent sous surveillance alors que d’autres dieux continuaient à ensemencer cette dimension.

Le rythme se stabilisa et l’on oublia les deux dragons dans le monde des dieux. La vie se développa et les premiers êtres apparurent. Le dieu des croyances, néanmoins, insuffla aux premiers hommes la légende des deux animaux mythiques. Les uns s’installèrent à la grotte du nord. Ils prirent le nom des hommes de bleu. Les autres au sud étaient les rouges. Tous vénéraient leur propre de divinité et ses qualités. Ils installèrent à chaque entrée un autel. Nul n’avait le droit de pénétrer ces sanctuaires en dehors du moine responsable des offices et de l’entretien. Mais jamais aucun de ces deux représentants officiels n’avaient osé partir à la découverte du fond de leur grotte respective. Ils n’en connaissaient que les premiers mètres. Les profondeurs étaient taboues. Chaque entrée servait d’autel devant laquelle un grand dragon de jade était posé. L’un bleu représentait Richeel, l’autre rouge, Uo. A leur pied respectif se tenaient les célébrations, étaient disposées les offrandes et les signes de respect et de dévotion.

Les villages se développèrent en correspondant à l’influence cachée des mythes. Le village bleu était tracé au cordeau. Les rues orientées savamment, rigoureusement correspondaient aux fruits de savantes réflexions et calculs. Les cultures se réalisaient selon la même recherche de logique, de précision et de réflexion. Tout différemment, le village du peuple rouge paraissait désordonné. Aucune maison n’était semblable. Certaines étaient décorées, d’autres non, certaines s’élevaient sur plusieurs étages, construites dans un style très différent de ses voisines proches. D’autres s’étendaient sur de grandes surfaces ayant préféré visiblement l’espace au sol à la hauteur. Les rues serpentaient en fonction de leur implantation aléatoire, tracées par un amalgame de forme. Il n’était pas rare que certaines, d’ailleurs, s’écroulent tellement l’architecture avait été délirante. Les champs occupaient des espaces libres à proximité, parfois même, dans le village et la nature même des plantations changeaient d’une année sur l’autre en fonction de l’impulsion du cultivateur. Parfois même ils ne plantaient pas dans le même endroit d’une année sur l’autre ce qui pouvait créer quelques complications avec l’occupant précédent. Le paysan devait s’être lassé du paysage et du travail. Généralement chacun réussissait néanmoins à trouver un point d’accord. La notion de propriété étant plus développé chez les autres se type de problème ne les touchait pas. Cela les amusait même jusqu’à développer chaque année un petit jeu sur ce qui pousserait ou pas sur telle ou telle parcelle.

Qu’étaient devenus les dieux créateurs de cet univers. Nul ne peut le dire car, s’ils s’étaient intéressés aux premiers développements de la vie, ils se lassèrent rapidement des avancées trop lentes à leurs yeux. Les peuples s’étaient multipliés, certains s’étaient fait la guerre, d’autres avaient disparus. Seuls les deux peuples au pied de la montagne étaient restés là où ils furent placés. Au bout de quelques centaines de rotations autour de l’étoile principale, le panthéon divin s’était peu à peu éloigné. D’autres mondes, sans doute, avaient attiré leur attention, plus prometteurs certainement pour trouver la réponse à leur éternelle question.

Le temps passa et chacun trouva son équilibre. Les uns et les autres prièrent leur divinité, source de leurs inspirations. Les villages se développèrent tranquillement. Les enfants se multiplièrent, devinrent adultes et engendrèrent d’autres enfants. Il y eu des prêcheurs d’autres religions, d’autres croyances mais chacun conserva son encrage. Les deux villages finirent par entourer ou presque le pied de la montagne sacrée où jamais personne ne s’aventurait à son sommet. La plaine était vaste et suffisait amplement aux besoins de chacun. Un jour pourtant naquirent deux enfants, l’un dans chaque village. Le premier était une petite fille aux yeux rouges et aux cheveux de feu. L’autre était un garçon aux yeux bleus et à la chevelure sombre. Tous deux avaient un point commun la curiosité. Ils se rencontrèrent souvent jusqu’à l’âge de raison lors de fêtes ou dans les champs. Leurs premiers contacts ne furent pas très satisfaisants car chacun était attaché à ses propres traditions. Très vite, le besoin de comprendre, de remettre en question ou d’agir selon ses envies pour l’autre se fit sentir. Si, lui, cherchait à comprendre, elle cherchait à vivre des expériences que nul avant elle n’avait pu vivre. Tous deux se rencontrèrent car entre raison et passion, réflexion, curiosité et envie de savoir ou de remettre en question les règles établies, rien que pour le principe, la limité était fine voir inexistante.

Un soir sans lune, alors que tout le monde dormait, le jeune garçon gravit la montagne jusqu’à la statue du dragon de jade. Le prêcheur dormait dans sa cahute et, au loin, les ombres des toits du village ressemblaient à un filet, ou à un damier de plaques noires serties des lignes grises. Sans le savoir, elle entamait la même escapade. De son point de vue, son village était un amas de pierres de tailles comme des chutes dans une carrière. Des serpents grisâtres ondulaient au milieu de formes hétéroclites. Passé l’autel, le dragon et ayant pénétré assez profondément dans la grotte où nul ne pu voir leurs lumières, ils allumèrent, sans le savoir, de concert, leur torche.

Pour lui la pente, le tunnel était droit. Les coudes présentaient des angles droits et s’articulaient par alternance entre gauche et droite. Le tuyau était un zigzag régulier et certainement logique et ses murs lisses aux éclats de bleu. Il n’en perçu pas le rythme, l’équation tout de suite. Pour elle, les parois rugueuses et flamboyante creusaient un boyau tantôt montant, tantôt descendant, allant de haut en bas sans cohérence aucune. Un labyrinthe en somme avec une seule direction possible représentait leur itinéraire. Ils furent, au bout d’un court moment incapable de dire s’ils descendaient ou montaient, s’orientaient vers le soleil, la lune, le ciel ou la terre.

Pour lui le couloir était un cercle parfait, le rythme des virages harmonieux et devenait presque enivrant tellement leur perfection et leur douceur s’enchainaient naturellement. Sans prendre conscience de ses pas il s’enfonçait et se perdait. Comme bercé il cru, à certain moment, perdre conscience et s’endormir. Il se sentait en confiance. Cela l’étonna. Il dû presque se pincer pour garder sa vigilance.

Pour elle le chemin était laborieux. Monter, descendre, virer, cela devint épuisant très rapidement. Elle sentit rapidement son cœur s’accélérer. Les parois étaient rugueuses, le chemin tortueux. Elle s’essouffla vite mais ne perdit pas courage. Elle voulait découvrir ce qui se cachait au fond.

Pour tous les deux la température variait sans cesse dans leurs boyaux respectifs. Elle passait du chaud et humide des pluies d’été au froid sec ou pénétrant de l’hiver. Les couloirs étaient tantôt sec et leur sol en terre devenue presque du sable, tantôt de la boue ou de la glace collante ou glissante les ralentissant. Le silence était pesant et reflétait l’écho de leur pas. Chacun se croyant suivit, ils interrompirent régulièrement leur marche. La voie de la connaissance est ainsi probablement. Il leur fallait de l’endurance ou leur curiosité était importante.

Leur marche dura un temps indéfinissable dans cette présence sans le repère des astres. Leurs torches s’amenuisèrent. Bientôt chacun n’aurait plus de lumière. Le jeune garçon sortit enfin du tunnel et se retrouva comme entrant dans une vaste salle. Les murs contenaient toujours de belles lignes bleues de jade presque pur. Il avança en choisissant d’aller tout droit. Bientôt il n’eu plus de repère, plus de mur. La torche lui brûlant presque les doigts n’éclairait qu’à quelques mètres autour de lui. Sans le sol sous ces pieds il aurait pu se croire dans le néant. Il ne pouvait faire demi-tour car la torche allait s’éteindre. Il ne retrouverait certainement pas l’entrée du couloir. Alors qu’il perdait espoir, il aperçu certainement loin devant lui une petite étoile. D’abord faible, elle sembla se rapprocher de lui. La petite lumière dansait devant ses yeux, il dû jouer avec sa torche diminuant pour s’assurer que ces yeux ne se jouaient pas de lui. Au bout d’un temps, alors qu’il semblait sur le point de l’atteindre elle disparut. Il accéléra le pas. L’écho se renforça. Il fut stoppé dans sa course par une vision inattendue. Une jeune fille qu’il connaissait se tenait devant lui, les yeux en paniques. Sa tenue rouge était maculée de poussières, de toiles d’araignée et de terre.

Il lâcha la torche sous la brûlure de la flamme restante. Ne pouvant quitter sa vision il plaça ses doigts endoloris dans sa bouche. Touts deux étaient incapable du moindre mot tellement leur étonnement fut grand. La torche rebondit sur le sol et s’arrêta sur une protubérance qui était passé inaperçue. Celle-ci s’embla s’enflammer prenant l’aspect de braises incandescentes. Le rouge se propagea suivant un chemin visiblement précis. Toujours sans dire un mot, les deux adolescents se rapprochèrent observant la progression de cette apparente flamme. Alors qu’elle sembla avoir parcouru l’ensemble du sol, elle prit une couleur vive et blanche. La pièce révéla toute son ampleur grâce à cette lumière providentielle. Le dessein longeait, probablement en forme de cercle, la base des murs. Au sein de ce cercle une forme gigantesque, impressionnante recouvrait la roche parsemée de jade rouge et bleue. Un dragon blanc à deux têtes couvrait le sol. La pièce entière était un mélange de ces deux pierres exceptionnelles.

Les deux adolescents découvrirent qu’ils étaient au centre d’une cavité insoupçonnée dont la taille dépassait l’imaginaire. Le plafond s’élevait en forme de cloche peut-être à la moitié de la hauteur de la montagne. L’ensemble était lisse d’un mélange rouge et bleu reflétant la lumière du dragon bicéphale. Ils restèrent un long moment silencieux à regarder le spectacle cherchant des yeux autre chose que le vide. Au centre de la pièce un promontoire accueillait une sphère gravée couverte de poussière. Ils s’en approchèrent. Prenant sa ceinture de toile bleue, le jeune garçon l’épousseta. Un globe de cristal sertit de symbole protégeait deux dragon de jades. Un rouge et l’autre bleu se faisaient face.

Une lueur s’éleva de la sphère jusqu’au sommet de la grotte. Les murs de la grotte s’illuminèrent révélant images et symboles. L’histoire de la création et de la lutte de Richeel et Uo dans son entier.

Ce qu’il advint des deux jeunes gents téméraires nul ne le sait. Toujours est-il que jamais on ne les revit sortir. Il arrive cependant qu’une petite lumière, les soirs sans lune, luit timidement au plus haut de la montagne. On dit même que des enfants très particuliers descendirent du sommet et s’enfoncèrent dans le monde.

Si vous douter de cette histoire, il vous sera presque facile de pouvoir la vérifier. La montagne existe. Il vous faut remonter le fleuve Amour et trouver le chemin entre deux de ses affluents : Raison et Passion. Ce chemin s’appelle Vie. Après avoir marché un certain temps, vous commencerez à découvrir une montagne dont le sommet se perd dans les nuages. Vous pouvez essayer de remonter un des deux cours d’eau qui ondule de part et d’autres du chemin, mais c’est très risqué. Chacun trouve naissance au pied de la montagne. En fait ils en sortent chacun de deux grottes. L’un vient du sud l’autre du nord.
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28 mai 2006 7 28 /05 /mai /2006 01:06

-« Il est temps jeune. Le soleil est sur le point de se lever. Vous ne voulez pas manquer cela. Debout ! »

 

Rentlau fut surpris dans son sommeil. Il avait éprouvé quelques difficultés à s’endormir. La marche l’avait épuisé mais il était un peu déboussolé. C’était la première fois qu’il dormait en dehors de chez lui. En fait, s’était la première fois qu’il sortait du village, de sa maison et qu’il quittait sa mère pour plus de quelques heures. La pièce était encore sombre et, comme au moment de se coucher, une maigre flamme ondulait dans l’âtre comme une veilleuse. La vielle femme versait de l’eau chaude dans des tasses faites de bois. Il se frotta la tête, les yeux, bailla et jeta le drap de fibres végétales qui lui avait servit de couverture. Elle était fine et rêche mais elle lui avait tenu chaud et protégé de l’humidité. Il se leva et alla s’assoir à la même place que la veille.

Des feuilles dansaient dans le fond des tasses, l’eau prit une couleur sombre. Le goût était fumé, fruité un peu amer.

- « Je n’ai jamais bu une telle infusion qu’est-ce que c’est ? »

- « C’est une plante que je fait pousser un peu loin d’ici. Des amis me l’apportent régulièrement. Avec l’eau de l’arbre c’est un vrai délice. J’ai envie de l’appeler tshae. Qu’en penses-tu ? »

- « Pour quoi tshae ? Qu’est-ce que cela veut dire ? »

- « Pas grand-chose en vérité, pour le moment. Mais c’est le seul nom qui me restait. C’est la dernière plante que j’ai trouvée. Le problème est qu’elle ne peut pousser que dans certaines conditions qui sont difficiles à réunir ici. Dépêchons-nous nous risquons de manquer le spectacle »

Rentlau fini de boire sa tasse de tshae et de manger un amalgame étrange, sentant le grain des herbes hautes et fines qui deviennent jaune en été.

- « Et cela qu’est-ce que c’est ? »

- « Je fais cela à partir des graines au bout des herbes une fois jaunies par l’été. Je les réduis en poudre. Je mes de l’eau et du sel et un mélange de mon invention qui fait lever la pâte. Une fois assez haute, je cuis le tout au four. Je l’ai appelé pain parce que la première fois que j’ai essayé de faire lever la pâte il y a eu des bulles et cela à fait « pain ! » lorsqu’elles ont explosé ».

Ils sortirent de la maison. L’herbe du chemin et les fleures se trouvaient maculées de rosée. Une légère brume ondulait au dessus d’elles. Le cirque d’arbre délimitait l’espace entre ombre et lumière entre leur cime et le ciel.

Ils contournèrent les larges racines. Rentlau découvrit que derrière un espace impressionnant s’ouvrait sous le ciel encore étoilé. La cime des arbres séparait la voûte bleue nuit d’une masse noire en direction du sol. Plus bas encore, un amas semblant incroyablement grand mais imprécis, jonchait le sol. Le ciel s’éclaircissait peu à peu et laissait deviner des formes, des courbes, des enchevêtrements imprécis.

Un vol d’oiseaux perturba l’éclat des dernières étoiles, un parfum, humide et riche s’éleva du sol. La vieil femme pris la parole à mi voix. « Regarde, sens et écoute. La nature se réveille tu va voir et sentir ce que peux peuvent découvrir. » Le ciel déjà se paraissait d’une lueur bleu, du noir du sol renaissaient des verts. La nature doucement réveillait ses couleurs diurnes et frémissait, comme sous une caresse, à l’apparition de la lumière. Les sons, la vie du jour émergeaient. Devant les yeux de Rentlau, dos à l’arbre et au centre du cirque végétal le spectacle pris forme en musique.

Les premiers rayons de soleil soulignèrent la crête des arbres. Un vert profond et dentelé accueilli en frémissant sous la première brise cette toute première chaleur. Le rayon descendit doucement et révéla les troncs. Il toucha ce qui résidait au sol. Dans un premier temps de longues feuilles vert clair attrapèrent la lumière et semblèrent se dresser sous cette douceur. A sa droite Rentlau découvrit sous ce nouvel éclairage, ce qu’il n’avait pu voir quelques secondes auparavant. De grandes tiges vertes, des boutons de fleurs, des arbres et des arbustes occupaient l’espace. L’angle lumineux s’étendit vers sa gauche comme pour n’éclairer que le cirque de verdure au sol. Il pouvait deviner sa progression à vue d’œil. Alors que les premiers bourgeons éclairés commençaient à éclore, à sa droite les grands arbres résidaient encore dans l’ombre. Lorsque tout le sol fut illuminé, le jeune garçon découvrit le deuxième acte du spectacle. Le soleil à sa gauche et la lune disparaissant à sa droite achevaient le tableau. Les premières fleurs réveillées s’ouvraient pour recevoir cette manne du nouveau jour. Une bouffé de parfums s’élevait avec un jeu de couleurs incroyables à ses yeux. Des blancs, des jaunes, des rouges des bleus et des mélanges, toutes les couleurs de l’arc en ciel avaient pris place dans les fleurs, les feuilles et les fruits du grand jardin dont la taille se révélait. L’espace était immense, où que son regard se porta il découvrait un diapason inconnu de forme et d’harmonie. Les lucioles s’étaient couchées mais tout un monde diurne fêtait l’arrivée de le l’astre solaire. La brume et l’humidité disparu, les insectes multicolores prirent leur envole. Des papillons de tailles, de formes différentes jouaient dans les rayons lumineux. Des libellules, des scarabées, des oiseaux s’envolèrent ouvrant une voie vers le ciel au bleu devenu claire et limpide. Si le couple de la création légendaire, dont lui avait parlé sa mère, avait réellement existé, ils auraient vécu au milieu de ce jardin extraordinaire. Le sien lui parut d’un seul coup insignifiant, pauvre et sans intérêt. Le jeune homme resta bouche bé tous ses sens recevaient des messages encore incompréhensibles. Il se sentit perdu tellement les messages arrivaient de tout côté en touffe, sans ordre, avec une force jamais égalée. Son regard ne savait pus où se poser. Tout se mélangeait avec une presque violence. La vieille femme le saisit fortement par le bras et le tira de son hypnose.

- « Attention jeune homme, si vous plongez sans préparation dans cette richesse vous risquez de vous perdre. Laissez-moi vous guider et vous apprendre. Je vous avais aider à aborder les jeux de la nature et toute sa puissance, sa magie et surtout toute sa force d’amour créatrice. Ensuite vous pourrez agir avec elle. C’est un peu violent au premier regard mais une fois que vous connaitrez ses mystères, son fonctionnement, vous pourrez trouver l’harmonie qui sommeille en vous et surement répondre à la question que vous vous posez depuis si longtemps. Pourquoi des mains de cette couleur ? Vous comprendrez alors que la réponse ne réside pas dans les mains mais dans le cœur qui les anime. Allons nous promener vous les vous, je vais tout vous raconter.  »

Ils parcoururent les allées, s’arrêtant à presque chaque végétal inconnu du jeune homme. Ce parcourt leur pris la journée sans que l’un d’eux ne paru fatigué. L’ombre des premiers arbres déjà s’allongeait sur le sol. Ils arrivèrent au pied du grand arbre. Rentlau avait la tête chargée de nouvelles informations et de nouvelles idées. Il se sentit comme surexcité, envahit d’une nouvelle énergie et d’un potentiel de création insondable. Un tel potentiel le submergea. Son regard plongea à ses pieds. Il découvrit une chose qu’il n’avait jamais vue. Elle était rouge parsemée de grain à espace régulier. Sa forme était faite de courbe et ne dépassait pas la largeur de son pouce. Les feuilles de la plante étaient larges et des filaments verts unissaient l’ensemble.

- « Puis-je vous poser une dernière question et savoir ce que c’est que cela ? » demanda le jeune garçon.

- C’est un fruit. Je crois tout du moins. Je l’ai appelé fraise car lorsque l’on récolte plusieurs d’entre elles dans un même récipient, elles ressemblent aux braises de la cheminée. Je ne pouvais pas les appeler brais car elle ne son pas chaudes, ni piquantes. J’ai donc changé une lettre. Goûte, tu me diras ce que tu en pense. « 

Il cueillit au pied du très grand arbre la seule qui apparaissait non cachée par ses feuilles et qui était demeurée au soleil toute la journée. Son rouge était vif. L’équilibre de ce qui ressemblait à des pépins, mais à l’extérieur, représentait un parfait équilibre. Ses formes arrondies en forme de cœur offraient une promesse de douceur. L’harmonie de leur distance semblait exacte. Il la porta à son né dans un premier temps pour deviner ou appréhender le goût de cette découverte. Le parfum était léger et timidement sucré. Entre ses doigts il entait déjà la douceur dû à l’exposition aux rayons de soleil d’une journée entière. Il porta le fruit à sa bouche et planta ses dents. Immédiatement une bouffé de parfum et de douceur envahit sa bouche. Il mâcha doucement et senti son palais inondé de sucre tendre et de ce qui faisait la spécificité de ce végétal. Il fut submergé par lui en un instant. La chair déjà descendait dans sa gorge mais gardait toute sa puissance. La première partie du fruit révélait encore sa richesse alors que sa bouche était vide. Comme émergeant de son ventre il devinait la présence du fruit. Une deuxième bouffé acheva l’existence du fruit. Il plongea Rentlau dans une extase. Il n’avait jamais rien mangé de semblable. Qu’un fruit pusse avoir un tel pouvoir sur les sens le fit frémir, une telle force lui fit presque peur, il cru que plus aucun fruit ne pourrait avoir de saveur à ses yeux et surtout en son palais. Lorsqu’il rouvrit les yeux le soleil était couché et le froid et l’humidité gagnait jusqu’à travers ses vêtements.

- « Réveille toi, tu vas prendre racine. Ce fruit est particulier, le soleil à fait son œuvre mais nous devons penser à rentrer. « 

 

Rentlau se retourna vers la vieille femme tout encore étourdi puis plongea, étonné, son regard vers le jardin. Toute la magie des plantes, de la journée, avait disparu absorbée par les ombres de la nuit. Tout était immobile. Seules quelques lucioles animaient comme des étoiles filantes les formes imprécises, la dentèle des cimes noires du jardin. Le bleu nuit profond du ciel et ses étoiles répondaient immobile à ce frénétique balai.

Ils contournèrent avec précaution pour ne pas tomber les grandes racines et entrèrent dans la maison. Une petite flamme dansait encore dans la cheminée éclairant de façon aléatoire la petite pièce plongée dans les ténèbres La femme prit une tige de boit et la plongea dans cette danseuse erratique. La petite flamme qu’elle en sortit lui servit à allumer l’extrémité de deux tiges de cire blanche apportant d’autres points de vie dans la chaumière. Ils passèrent rapidement à table sous ces lueurs vibrantes au grès des courants d’airs. Un assemblage de végétaux, une nouvelle tranche de ce qu’elle avait appelé « pain » composa le principal du dîner. Ils échangèrent ensuite leurs avis sur cette journée, les découvertes et Rentlau reçu sans réserve aucune toutes les réponses à ses questions. La lune était déjà haute éclairant par des rayons blancs et froids l’intérieur proche des fenêtres. Son hôte invita le jeune visiteur à aller se coucher. Demain était prévu la marche du retour. Il lui faudrait avoir reconstitué ses réserves pour enregistrer les chemins, les codes et les mots destinés aux plantes du passage. Elle lui rappela que cela était essentiel s’il ne voulait pas déambuler pendant des jours sans trouver le chemin, voir se perdre sans espoir de retour.

- « Au delà de tout ce que nous avons vu et découvert aujourd’hui, il faut comprendre que la nature à un langage, des obligations et des règles auxquelles il ne faut pas déroger. La première est de la respecter comme ton égale. Pour cela il faut rester à l’écoute, observer et surtout ne pas hésiter à dialoguer. Il fait savoir que les plates ont un langage et chaque espèce possède son propre mode d’expression. Pour partir d’ici et revenir si besoin était je vais t’apprendre le minimum nécessaire. Pour le reste tu devras le découvrir par toi-même. C’est le meilleur moyen de découvrir et de comprendre les choses au plus profond. »

Ils partirent alors et Rentlau resta silencieux. Tout ce discourt lui paru un peu farfelu mais il voulait rentrer chez lui. Sa mère lui manquait, sa maison et surtout son jardin. C’était sa zone de confiance et le quitter aussi longtemps malgré les découvertes qu’il fit, l’absence, l’incitait à renter. Ils quittèrent l’arc de troncs, le vieil arbre et la magie du jardin pour l’ombre quasi nocturne de la forêt profonde. Très vite il perdit ses repères mais aidé de la vieille dame servait à chaque instant de fil d’Ariane. Quelques rayons perçaient la canopée apportant des reflets d’émeraudes et toute une déclinaison de verts. Au dessus le ciel devait être limpide, exsangue de nuages.

Le parcourt lui paru plus court qu’à l’allée. Très vite et malgré les discutions, les explications incessante de sa guide, la nuit végétale se fit douce clarté. De clarté à une lumière grandissante il retrouva ses espaces de découvertes, son terrain de jeu. La forêt s’ouvrit enfin face au village et à la maison de sa mère, à son « chez lui ». Il prit une grande bouffé d’air devenu lourde et sèche. L’humidité protégée par les cimes de feuilles avait disparu. Les champs s’ouvraient au soleil du début d’été. La veille dame resta dans l’ombre et lui tendit un sac.

 

-" Voici un sac contenant des graines de certaines plantes dont nous avons parlées. Si tu as bien retenu nos discours tu devrais pouvoir les faire grandir et naître. Une fois apprivoisées, tu auras libre court pour ton imagination et ta créativité. Mais attention, mêler des plantes s’est mélanger leurs qualités comme leurs défauts. Il en va de même à chaque rencontre que tu feras. A bientôt. Tu connais le chemin, viens quand il te plaira, mais n’oublie pas de te présenter à chaque fois que tu souhaiteras pénétrer la forêt. Elle te laissera ainsi passer. Les arbres parlent entre eux, maintenant tu le sais. "

-"Merci pour tout et surtout pour ces graines et tout ce que j’ai pu découvrir. Mon jardin va pouvoir grandir et devenir un point de rencontre. Merci ".

Sur ces mots le jeune garçon sorti complètement de la forêt, poussa la petite porte, jeta un regard sur son jardin et entra chez lui. Sa mère l’attendait avec une surprise. Un visiteur ou au plus juste, une personne inattendue dont leurs regards ne s’étaient pas croisés depuis longtemps. Elle avait grandit et lui aussi. Mais ces yeux lui parurent plus beaux que de ses souvenirs, encore plus mystérieux et profonds.

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18 mai 2006 4 18 /05 /mai /2006 23:41

L’homme bic ou l’homme B.I.C : Chance fort Immédiat Buddy

      Business Inn Chance

 

 

 

 

 Au dix neuf ou vingtième siècle quelqu’un à dit « la femme est l’avenir de l’homme » comme si l’on avait eu le choix.

Ce qui n’avait été qu’une annonce avec la libération de la femme, pris toute son envergure un siècle plus tard. Le constat était évident. Alors que les hommes avaient décidé du sort du monde pendant plusieurs siècles, l’air de la femme était venu.

 

 

 

Elles occupaient toutes les fonctions les plus stratégiques, les plus importantes et l’homme était enfin relégué aux tâches les moins valorisantes. Le visage de la société en fut changé. Plus de douceur, de couleurs mais surtout plus de dureté, moins de pitié était les bases des valeurs modernes. Les femmes avaient dû lutter, être dures même entre elle et la compétition entre individus tenait plus du combat à mort que du match de foot. Pas d’échange de t-shirt à la fin du match, la vaincue était éjectée. L’ascension sociale était la seule inspiration et aspiration de notre société. Vaincre plutôt que perdre car perdre était un retour à la case départ. Il était facile et surtout rassurant de penser que le propre de la femme était la douceur et la sensibilité. Elles n’avaient retenu de la domination des hommes que l’esprit de compétition comme la mise à mort du taureau. Seules les plus fortes nerveusement, les plus créatives voir les plus vicieuses avaient une chance. L’intelligence était le bouclier, l’ambition l’épée. Les hommes étaient perdus, renvoyés à leurs propres faiblesses où seuls ceux qui ayant réussi à comprendre leur fonctionnement avaient une chance de survie. Quelques uns avaient réussi au milieu de ce combat à se maintenir au dessus de la masse, ils étaient devenu non seulement des tueurs, des machines capables de créer des empires mais avaient oublié jusqu’à leur part de féminité. Plus aucun compromis dans leur esprit, l’instinct de survie était le plus fort. Ils vivaient au dessus des autres refusant leur appartenance au clan d’en face, au clan des hommes et possédaient toutes les compétences du meilleur des politiciens.

En 2000 il y avait quatre femmes pour un homme. Moins de cinquante ans plus tard la proportion était passée de une pour dix. Nous avions nous même creusé notre destinée. Les guerres n’avaient pas cessées et seuls les hommes étaient en première ligne. Nous nous décimions tranquillement alors qu’elles nous encourageaient au nom de l’admiration et du devoir. Au fur et à mesure les postes de commandement furent également pris par les femmes. En 2004 il n’y avait que quatre femmes générale aujourd’hui il ne restait que 4 hommes. Les ministres, les PDG tous avaient cédés en grande partie leur siège aux femmes. Alors que pendant des siècles elles nous avaient admirés, estimés, parfois aimés, la seule utilité de la gente masculine sembla se résoudre désormais uniquement au rôle de reproducteur et de bras pour les travaux nécessitants du muscle.

Les naissances se sont trouvées grandement mises en danger par cette quête quasi compulsive. Les femmes devaient faire entrer dans leur planning, et ce, de façon stratégique leur désir de grossesse. Il fallait ensuite tenir suffisamment pour ne pas être absente trop longtemps. S’inspirant du moyen âge, l’allaitement est confié à d’autres dont les compétences nécessaires pour participer à la lutte pour la réussite uniquement professionnelle étaient insuffisantes. Les seuls vacances que certaines s’autorisaient étaient donc ce congé de deux jours pour maladie naturelle. Elles calculaient de toute façon pour que ce grand évènement se passa un week-end. Si besoin était elles déclenchaient les contractions le vendredi soir. Une solution alternative fut étudiée : l’utérus artificiel. Génétiquement l’enfant était défini dès la conception : sexe, aspects physiques et mentaux. Mais il sembla manquer quelque chose pour véritablement en faire des êtres humains. Leur relations aux autres, avec le temps, ne les intéressaient pas. Ils finirent tous par devenir ermites.

Bref, elles qui avaient pendant tant de temps milités pour l’égalité des sexes faisaient machine arrière pour se venger de l’homme. L’air de la femme était installé et promettait de durer.

Il n’y avait pas que des désavantages. Leur habitude du militantisme, de l’action par rapport à une idée leur avait permis de pousser les concepts écologiques jusqu’à leur réalisation. De ce fait, une belle avancée, notamment dans la recherche d’énergies propres fut une belle réussite. Cela de toute façon devenait une évidence, il n’y avait plus de pétrole. Les pays de l’OPEP s’écroulaient lentement mais surement. Certains gardaient néanmoins la tête hors de l’eau. Nous avions la Suisse en Europe, on trouvait aujourd’hui cinq ou six pays équivalents au moyen orient. C’était également en leur sein que la place de l’homme conservait un semblant de dignité. Certains européens préfèrent donc immigrer et demander presque l’asile politique. Une partie d’entre eux accepta même de changer de religion. Le flux migratoire, dans quelques uns de ces pays s’était tellement inversé que les gouvernements fermaient régulièrement leur frontière, développaient des programmes d’intégration pour ne capter que les personnes valables. Ils devaient donc gérer les pressions extérieures mais aussi intérieures. Leurs femmes réclamant également les mêmes droits que leurs sœurs étrangères. La résistance féminine était présente et parfois financé par des pays de l’hémisphère nord. C’étaient les seules zones où le conflit des sexes prit à certaines occasions un aspect violent voir sanglant.

 

 

 

La science a avancé en partie grâce à leur concurrence acharnée. Un nouveau service pour les puissantes était né. Certains hommes avaient compris que si l’on ne peut se mesurer à son ennemi il faut le contourner, utiliser ses faiblesse. Un moment ou l’autre elles ont besoin de compagnie. Pour une nuit, pour un week-end peu leur importait. Ces gigolos étaient jeunes et généralement beaux. Comme certaines femmes l’avaient fait à une époque ceux-ci cherchaient à se faire entretenir. La solution fut de courte durée. Pourquoi payer pour quelqu’un que l’on ne voit que de temps en temps ? Certaines apportèrent la solution. Elle s’appelait B.I.C.. Ces hommes étaient conçus pour un temps limité par la science du génome humain. Nous pouvions alors unir des cellules pour un laps de temps plus ou moins long. Le maximum était en fait de 48 heures. Il suffisait pour ces femmes de déterminer les attentes physiques et mentales de ces compagnons du moment. La machine faisait le reste. Le produit était alors livré en toute discrétion au lieu souhaité. Au bout du temps défini l’homme BIC s’évaporait. La molécule de base était l’eau. Un clin d’œil sur ce qu’elles pensaient de l’homme ou de ce que nous avions dans la boîte crânienne.

 

 

 

L’appartement en face du mien avait été occupé pendant un temps par une de ces femmes affairistes. Son prénom était Alexia. D’un physique plutôt menue, cette personnalité discrète paraissait craindre les autres - Plus exactement tous les autres. A son arrivée, ses cheveux étaient blonds, longs et bouclés. Son regard clair et craintif était en harmonie avec sa peau, pale. Elle dégageait néanmoins une certaine sérénité. Comme un fantôme circulant dans les couloirs, elle se déplaçait sans bruit. Tout était contrôlé. Son manque d’assurance ou de confiance en soit en devenait plus marquant et inscrit dans chacune des parties de sa personnalité. Elle ne se perdait pas en parole, ses phrases étaient courtes, précises et mesurées. Il me fallu beaucoup de temps pour l’apprivoiser, la voir se détendre lors de nos rencontres impromptues aux abords de la porte d’ascenseur. Une seule fois en 4 ans, je pu pénétrer en face, dans un appartement de femme active et, apparemment dynamique en phase de réussite. Il n’y avait que quelques meubles préfabriqués, de ces meubles que l’on livre en kit. L’installation ne reflétait pas une recherche d’esthétisme ni une marque personnelle. Elle témoignait simplement d’une recherche du sens pratique, juste aller à l’essentiel. L’entrevue fut courtoise, court et fragile. Je dis fragile parce que je l’avais senti mal à l’aise. Je ne me suis pas éternisé et lui avait proposé de passer chez moi à l’occasion. Elle ne répondit pas vraiment. Ce fut juste un hochement de tête.

Quelques jours plus tard, elle arriva les cheveux coupés au dessus des épaules. Elle avait tenté cette expérience sur les conseils d’une amie. Etait-ce un piège pour achever de la déstabiliser ? Elle avait mis beaucoup de temps à s’adapter à sa nouvelle personnalité. Je cru d’ailleurs qu’elle avait accepté ce défis pour se bouger de ses propres interdictions. Elle gagna un peu plus en confiance. Un mois ou deux plus tard, alors que je revenais de quelques courses, elle paru sur le pallier, grise, terne. Elle ne voulu pas parlé de ce qui c’était passé, de ce qui avait changé. Quelques jours plus tard, un camion se gara en bas. Ils emballèrent ses affaires. Elle disparu pour toujours. Je fis suivre ses dernières lettres à une poste restante.

 

 

 

Elle fut remplacée par une autre jeune femme presqu’immédiatement prénommée Thaliae. Elle prit les clés le soir du départ d’Alexia et s’installa le lendemain. Digne représente de son sexe elle avait fait de brillantes études, passé les concours et certainement quelques coups tordus. Deux ans plus tard elle aussi s’écroula et n’espéra qu’une chose, disparaître. Pourquoi me dire-vous ou à cause de quoi. Je vous répondrais simplement à cause d’elle, de sa nature et de la nature humaine. L’être est né pour aimer, ressentir des sentiments et surtout les exprimer sincèrement. Nommée à un poste de direction très jeune, trop peut-être, elle s’était sentie en sécurité, intouchable avec un avenir pouvant lui apporter la fortune. Son caractère déterminé voir hargneux lui garantissait une carrière plus que correct. Elle n’était pas de celles qui font des cadeaux, je pense même qu’elle était capable plus de manier le bâton que la rose.

 

 

 

Elle était relativement mais bien proportionnée. Sa plastique trahissait une certaine robustesse sous des courbes et un charme fou. Son regard surtout était le plus impressionnant. Par ses yeux bleus clairs et des sourcils bien dessinés, toute personne qu’elle regardait, se sentait devenir exceptionnel. Il n’y avait plus alors sous ce regard que deux personnes : vous et Thaliae. Elle savait en jouer d’ailleurs, passant d’un regard de femme à celui d’une enfant, d’un œil amusé, charmeur à celui d’un froid digne de l’Antarctique. J’en imagine plus d’un qui eurent droit à toute la panoplie, dans le plus mauvais ordre. Elle ne savait aller que du meilleur, du plus beau vers le plus dur, le plus laid.

Elle était particulièrement enjouée voir d’un caractère joueur. Fredonnant sans cesse quelques airs, quelques chansons. Elle exprimait ainsi son goût de la vie. Malheureusement pas celui de la musique car la plus part du temps sa voix partait trop dans les aigus et devenait fausse. Très coquette, elle ne dépensait pas, néanmoins, toute sa formidable paie dans les vêtements. Elle avait l’œil suffisamment expert pour dénicher dans les endroits inattendus, le bon vêtement, le bon accessoire. Tous pouvaient la penser vêtue de grandes marques mais il n’en était rien. Un article avec un prix à deux chiffres trop coûteux. C’était sa seule obsession, cela et ses ongles. Son grand rendez-vous, son moment de joie culminant, résidait dans l’instant où elle se préparait pour le salon, le roi de l’ongle artificiel. Toujours bien mise donc jusqu’au bout des doigts, la seule excentricité qu’elle se permettait était ses cheveux. Noirs et fin, ils étaient courts et coiffés en pagaille avec force gel. Là encore cet apparent désordre était intégralement calculé, contrôlé.

Le temps m’a appris que les extrêmes révèlent souvent plus qu’ils ne cachent. Celui qui sait les voir peut percer plus facilement que d’autres, découvrir les points faibles et la véritable personnalité. Sa force cachait en fait une grande fragilité. Son talon d’Achille résidait dans sa nature même, ses sentiments et sa volonté farouche de plaire. Elle séduisait donc tout le monde usant de toute sa panoplie d’artifices. Elle manipulait les autres par leurs affectes. Lorsqu’ils devenaient trop proches ou qu’elle-même devait s’engager sentimentalement au risque de perdre le contrôle, elle faisait demi-tour. Trouvant toutes les raisons possibles, déplacements, travail et j’en passe. L’autre finissait par se lasser. La période de conflits s’installait et tout finissait par exploser.

Il fallait être un minimum vigilent ou psychologue pour ne pas tomber dans ses pièges. Mais on trouve toujours son maître ainsi va la vie et sa roue. Celui-ci arriva dans la solution qu’elle avait trouvée pour y échapper. Elle ne pouvait rester seule, il lui fallait sa cours, ses admirateurs, ses victimes. Les hommes BIC étaient au final le meilleur moyen qu’elle trouva. Elle pensa conserver une bonne conscience. Ils ne pouvaient pas souffrir puisqu’ils ne vivaient qu’un temps restreint. Elle ne pouvait pas tomber dans les pièges de l’amour puisqu’elle savait que le lendemain ils disparaissaient. Elle passerait un bon moment assouvissant ses frustrations, ses angoisses cachées sans avoir à les assumer. Ce serait un acte sans lendemain ni risques d’engagement.

 

 

 

Nous ne nous croisâmes que de rares fois la première année sur le pallier. Elle avait pris la décision de mettre tout son courage et son énergie à s’intégrer tant dans sa société que dans cette nouvelle vie. Elle partait régulièrement en voyage ou revenait tard. Lorsque cela lui était possible elle sortait pour montrer son côté dynamique, faire des rencontres, imposer sa présence comme le mètre étalon de ce qu’il fallait faire et être. Elle perdit quelques kilos cette première année. Ces yeux se creusèrent un peu mais l’art des apparences et le maquillage effaçaient ces légers moments de faiblesses. Elle tenait à montrer à tous sa solidité. Cela fonctionna elle eu rapidement une promotion. Non seulement ils chargeaient la mule mais en plus la mule en redemandait. Elle prit véritablement le visage des femmes de ce temps. Elle sélectionnait de plus en plus les personnes de son entourage, méprisant l’erreur, la faiblesse et le manque d’originalité. Tout ce qui valait à ces yeux d’être considéré était conservé, voir élevé. Le reste se retrouvait rejeté parfois même avec une grande violence.

La deuxième année se terminant elle avait fait son trou et creusé d’autres, où certains surement étaient enterrés. Les victimes de sa soif de séduction, d’ascension sociale avait dû faire des victimes qui, probablement erraient dans les rues, dans leur travail ou leur appartement en essayant de comprendre ce qui avait bien pu se passer. Elle avait le don de vous emmener sur un terrain, le sien, que tous crurent solide. Lorsqu’ils se détendaient, ils étaient pris au piège. Le sol se dérobait, elle en fait, et tout s’écroulait. Elle préférait sans doute frapper la première au lieu de risquer d’être victime du sort ou de la vie. C’est à ce moment de presque stabilité dans sa vie qu’elle s’adressa pour la première fois à la compagnie des BIC.

 

 

 

J’imagine très bien ce qui se passa. Elle hésita un moment, cherchant des informations sur internet calculant les risques, les fonctionnements et la meilleure adresse. Elle dû se renseigner discrètement auprès de personnes ayant avouées avoir fait appel à ce type de service. Elle prit rendez-vous annonçant sa fonction et ses moyens, puis le dimanche matin suivant se lança. Elle sortie de la tour un peu plus discrètement que d’habitude, s’engagea dans la rue puis dans le métro, encore désert à cet heure. Un peu plus tard elle monta les escaliers la livrant à l’air libre et surtout à la lumière printanière. Une brise lui caressa la joue, et un rayon de soleil lui fit mettre ses lunettes. Elle prit une grande bouffée d’oxygène et se dirigea vers l’entrée d’un grand immeuble en verre. Il faisait parti d’un ensemble de trois tours placées en forme de triangle. On pouvait deviner au milieu d’eux un jardin presqu’un parc. Des branches et quelques roseaux dépassaient. Elle s’arrêta un instant, leva les yeux vers le logo de la société puis poussa la porte à battant. A la réception les hôtes d’accueil encostumés aux couleurs de la charte de la société lui lancèrent un sourire discret en même temps qu’un bonjour. Je suis Thaliae j’ai un rendez vous avec Mme Borsa. Dit-elle relativement froidement.

- Tout à fait, vous pouvez prendre l’ascenseur 2. Son bureau se trouve au 18ème étage, elle vous accueillera à votre arrivée. Bonne journée mademoiselle.

- Merci. Répondit-elle d’un ton direct

 

 

 

Thaliae se dirigea vers le couloir 2, déclencha l’appel de l’ascenseur qui s’ouvrit presque aussitôt. La cabine était déserte ce qui lui permit de se détendre un peu et de chasser son appréhension. Elle vérifia sa tenue dans le miroir et se retourna à l’ouverture des portes. Mme Borsa l’attendait avec un grand sourire. C’était une femme qui fut certainement très belle. Les années, les nuits blanches de travail avaient commencé à marquer son visage et plus particulièrement autour des yeux. Son tailleur gris claire avec un liserait bleu répondait à l’harmonie de ces yeux.

 

 

 

- Bonjour Melle Thaliae je suis, Mme Borsa, la directrice adjointe. Je m’occuperai personnellement de votre dossier. Soyez la bienvenue. Vous n’avez pas eu trop de soucis pour trouver nos locaux ?

- Bonjour, non je connais bien l’endroit

- Je vous propose de me suivre dans mon bureau, nous y serons plus tranquilles pour discuter de vos attentes que dans les salles habituelles. Souhaitez-vous boire quelque chose ?

- Un thé je veux bien

Borsa s’adressa à un homme au fond du couloir. Bob Apportez nous deux thés.

 

 

 

 

 

 

Son bureau possédait de grandes vitres qui, étant placées dans un coin de l’immeuble permettaient non seulement un éclairage naturel confortable, mais surtout une vue intéressante de la ville. Le mobilier et la décoration dans son ensemble marquait un certain raffinement et surtout un esprit moderne. Aller au plus simple au fonctionnel, limiter le surplus, l’inutile était la tendance et surtout l’esprit général de notre époque. Donc un bureau, un fauteuil malgré tout confortable, deux plus petit de l’autre côté pour accueillir collaborateurs ou clients composaient l’essentiel du mobilier dédier au travail. La table correspondait en tout point aux attentes pour ce type d’endroit et avait inondé les directions de presque tous les bureaux de direction. Le plateau était en verre. Un clavier tactile y était incrusté. Un bouton déclenchait son inclinaison pour le transformer en tableau en cas de réunion. Le reste de la surface était un vaste écran. Le lancement de l’ordinateur se faisait par la pression du pouce à un coin de la table. L’emprunte était la seule clé. Un des pieds pouvait recevoir des clés de type USB du début du siècle mais plusieurs centaines de fois plus puissante. Les autres pieds servaient d’enceinte ou d’antenne. Dans le bâtiment, quelque part, un ordinateur central suffisait pour pouvoir gérer le travail de centaines de personnes en simultané. De ce fait, plus de véritable PC, tout était centralisé. Cela avait un mérite pour les diverses directions générales, ce qui était fait dans les bureaux, restait dans les bureaux. Plus moyen d’utiliser l’ordinateur pour son intérêt personnel, tout était contrôlé.

Le reste du bureau était occupé par deux canapés et une table basse. Placés en L face au bureau, ils permettaient tout en discutant d’admirer la vue. La table basse était elle aussi fonctionnelle, et en verre, mais ne permettait de ne recevoir que les appels téléphoniques ou plus exactement visiophoniques. Pas de tiroirs, pas de rangement, depuis près de dix ans personne dans les bureaux n’avaient touché de papier. Tout étant informatisé, sauvegardé l’utilisation du papier était devenu obsolète. Les moyens de communication moderne avaient permis de protéger les forêts.

Les deux femmes prirent chacune possession d’un place, chacune dans un canapé. Bob entra, salua Thaliae, lui tendit un tasse ainsi qu’un assortiment de sachets de thé et un petit bol contenant différents types de sucre. Se retournant vers sa directrice il lui tendit le même service avec en plus du lait. Mme Borsa le remercia d’un ton plus que sérieux et le pria de les laisser. Pour mettre sa nouvelle cliente à l’aise elle entama la discussion sur des banalités presque sérieuses : travail, responsabilités, style de vie, vision de son avenir.

 

 

 

- Alors dites moi pourquoi êtes vous ici, que venez vous chercher et surtout trouver. Que puis-je faire pour vous.

- Une amie m’a parlé du type de service que vous procurez. Je ne cherche pas une relation durable. Je n’ai pas le temps de m’encombrer avec cela. Je cherche simplement à passer de bons moments avec quelqu’un qui pourrait me ressembler, tout du moins, dans le caractère. Je ne pense pas forcément aux relations sexuelles, simplement à une échappatoire aux relations purement professionnelles.

- Vous êtes visiblement comme la plus part de nos clientes. Rassurez vous cela concorde en tout point avec notre raison d’être. Savez-vous comment cela se passe ?

- non pas vraiment.

- C’est relativement simple. Nous allons prendre une mèche de vos cheveux. Le nombre vous appartient et de lui dépend le nombre de créations que nous pourrons faire. Ce nombre est important car comme vos cheveux poussent en permanence la caractéristique de ce que nous allons créer en dépend. Ensuite nous ferons un léger prélèvement de sang. Celui-ci dépend du nombre de cheveux que vous souhaiterez nous confier. Ceci nous permet de déterminer un nombre, ensemble d’homme BIC, que nous pourrons réaliser. Pas un de plus. Il vous faudra revenir si vous souhaitez continuer mais ils ne ressembleront pas exactement à ceux du premier prélèvement. Sachez, si cela peut vous rassurer que vous ne pourrez pas tomber enceinte si vous décider d’aller plus loin de le rapport avec ce presque homme. Rappelez-vous que nous les créerons en fonction de vos attentes. Cela sous entend que nous vous ferons passer un questionnaire. Répondez en toute tranquillité. Plus vous serez précise, relâchée, plus ce que nous créerons correspondra à vos attentes. Comme vous le constaterez c’est très simple. Je vous propose de vous laisser seule un moment, j’ai une affaire urgente à régler, ce la vous permettra de réfléchir.

- Très bien à tout de suite.

Barso disparu laissant la jeune femme à ses pensées. Comment être certaine de la confidentialité des testes. Comment être certain de ce qu’elle souhaita ? Tout cela devait s’enchainer dans sa tête. Mélange d’angoisse et de détermination poussé par le fait que d’autres en pleine ascension avaient déjà fait appel à ce service. C’était d’une certaine façon une marque supplémentaire de réussite et de croissance, elle ne pu reculer.

- Bien, alors que pensez-vous de tout cela, nous continuons ?

- Oui, je ne suis pas venu pour rien et j’apprécierai de pouvoir faire vite, je dois travaille cet après midi.

- Pas de problème, je vais appeler ma collègue Céline qui vous prendra en charge. Je vous demanderai simplement de remplir certains papiers avant et de régler l’acompte.

- Pas de problème. Voici le chèque. Laissez-moi simplement le temps de lire les documents et je les signe.

- Un dernier détail. Il vous faut définir le nombre de réplique que vous souhaitez voir développer. Comme vous le verrez en page 18 de la procédure, nous prélèverons un certains nombre de cheveux, quelques larmes et un peu de peau. Rassurerez vous c’est complètement indolore. En fonction du nombre de cheveux nous ne ferons qu’un nombre déterminé d’homme BIC. Réfléchissez bien.

 

 

 

 

 

 

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5 mai 2006 5 05 /05 /mai /2006 17:22

Rentlau et Tialaeti

 

L’origine des roses et des couleurs

 

 

 

A l’origine, le monde était simple. Les hommes s’étaient organisés en petits villages et commencèrent à vivre en paix. Il y avait peu de couleurs. Le monde n’était pas en noire et blanc, non, mais la nature n’avait pas pris le temps de compléter sa palette. Chaque élément, chaque personnage de la création continuait à travailler à la réalisation du grand œuvre.

 

Parmi ces quelques villages, il y en avait un. Pas plus grand que les autres, pas plus petit non plus, pas mieux placé par rapport aux ressources. Il était là parmi les autres bordant simplement une grande forêt. Les hommes n’en avait pas fait tout le tour ni n’avaient découvert tous ses chemins. Les villageois avaient à ses abords, créé leurs champs, disposé leurs maisons et leurs jardins.

Tous les villages possédaient la même structure de sorte que chacun pouvait facilement se repérer en voyage. Constitué sous la forme d’un cercle coupé par deux routes perpendiculaires, les rues formaient des cercles comme un labyrinthe simple. Au centre se trouvait la maison du village nommée la Grande Maison. Elle occupait différentes fonctions selon les heures de la journée et les jours de la semaine. Au centre de la Grande Maison se trouvait une place, sur cette place, le jour une fontaine, le soir un foyer qui éclairait jusqu’aux murs. Marché, lieu de rencontre, point de rendez-vous, taverne, c’était le centre de vie de chaque village. A l’étage et sous les toits des espaces étaient aménagés, soit en réserves soit en chambre et la Grande Maison devenait ce que nous pourrions appeler aujourd’hui, une auberge. Le plus souvent et en fonction du nombre d’enfants, certaines salles occupaient la fonction de lieu de transmission.

 

La vie s’écoulait et le village croissait tranquillement. La population œuvrait, chacun à sa tache et chacun conservait sa place. Au milieu d’elle vivait une femme. Simple dans ses manières, discrète mais sincère dans ses relations. Elle eut un jour un garçon. La grossesse fut sans faits marquants mais l’accouchement fut surprenant. L’enfant naquît avec les mains d’une couleur presque inconnue. Elle était proche de la végétation qui pousse au raz du sol ou de celle des feuilles après la saison du froid. Sa mère pensa que ce n’était pas important et que cela passerait avec l’âge, mais il n’en fut rien. Plus le garçon grandissait, plus ses mains imposaient cette presque nouvelle couleur. A l’âge où il est tant d’apprendre et de se mélanger aux enfants, elle eut un doute. Fallait-il le présenter aux autres ou le cacher.

Il était de tradition dans chaque village, que la mère présente son enfant  l’âge de trois ans. Le moment venu et les ainés vinrent chercher l’enfant. Elle les accueillit avec cordialité mais un peu gênée. Elle qui toujours fut si courtoise parut étrange, et le plus vieux des vieux lui en demanda l’explication. Elle montra l’enfant. Chacun le regarda, amusé de ses premiers mots et par ses yeux curieux des nouveaux visages. Il ne semblait pas timide et portait la douceur des traits de sa mère. Mais lorsqu’elle montra les mains, ils furent tous surpris. Un long silence s’installa. Le plus vieux dit :

- « Nous ne savons pas tout mais nous pensons que tout à sa raison. Nous ne pouvons cacher l’existence de cet enfant. La raison de ses mains viendra avec le temps. Présentons-le. » Ainsi fut fait et l’enfant quitta sa mère pour sa première journée à la grande maison.

 

Les enfants sont joueurs, parfois curieux, mais très tôt moqueurs. La première journée se passa assez mal. Les autres rirent à la vue de ses mains et l’enfant fut vexé. Lorsque les veux demandèrent le nom que devrait porter l’enfant, la mère dit : « Puisque chaque chose possède sa raison je pense que Rentlau serait judicieux. » Dans le langage des anciens ceci voulant dire mains couvertes. Le plus vieux réfléchit puis sourit. Cela peut être intéressant, dit-il, de mettre en avant sa spécialité. « N’est-ce pas pour cela que nous présentons les enfants à leur premier âge de raison ? Il en sera ainsi et ton fils s’appellera Rentlau. »

 

Une autre enfant fut présentée. Au grand étonnement de la mère du petit garçon, c’était une petite fille aux cheveux sombres comme la nuit mais aux yeux comme le ciel d’été. Elle était, elle aussi, mal à l’aise de présenter une enfant sortant à ce point des autres. Elle était pleine de douceur et son regard exprimait une certaine vivacité. Mais ces yeux étaient comme le ciel alors que tous avaient les yeux marron. Sa mère annonça son nom : Tialaeti ou le ciel est dans ses yeux.

Leur premier jour se passa dans le silence mais les suivants furent difficiles. Tialaeti, elle suscitait de l’intérêt car les autres enfants étaient devenus sensibles et curieux de ses yeux. Elle avait appris à les utiliser et la solidarité féminine fit qu’elle trouva rapidement de l’appui en cas de raillerie. Rentlau, lui, devint renfermé et solitaire car ses mains faisaient peur. Les autres enfants avaient commencé par se moquer et à la longue étaient passés à d’autres jeux.

Sa mère s’inquiéta et les vieux laissèrent faire. Ils dirent que tant qu’il n’aurait pas trouvé, par lui-même, la raison de cette différence, il ne trouverait que difficilement sa place. Au moment il l’aurait trouvé, son monde s’en trouvera changé.

Le temps passa et il eu 5 ans. Il passait la plus part de son temps dans la maison de sa mère et surtout se mit à découvrir le jardin, derrière la chaumière. Ce n’était pas un grand jardin. Il était entouré par une palissade de bois à claire voie et une petite porte au fond permettait de se diriger directement vers la forêt.

Secrètement et discrètement il multiplia ses visites dans la forêt. Aux abords dans un premier temps, puis il prit son courage. Au fur et à mesure, il pénétra plus profondément. Il regardait, écoutait, sentait ce paysage presque inconnu et de moins en moins inquiétant. Une voix semblait l’appeler il fallait qu’il découvre de plus en plus les ombres des grands arbres séculaires. Il comprit également comment déchiffrer la croissance des arbres. Lorsqu’au pied d’un grand une pousse naissait, la similitude des feuilles l’invita à comprendre.

Sa mère s’aperçu de ces disparitions et inquiète fini par lui interdire ces pérégrinations. Il rusa, mais ne pouvant pas se priver de la forêt, il décida de la transporter chez lui, dans le jardin.

Cela commença par quelques pousses, quelques arbres, quelques fleures. La première année le jardin prit une nouvelle apparence. Des couleurs, des feuillages, des senteurs naissaient. Une nouvelle géométrie également et tout cela de façon subtile, quasi indicible. Sa mère n’y prêta pas attention. La deuxième année, l’ensemble devenait structuré selon un plan de circulation. Ceci donnait l’impression de voyager entre ombre et lumière selon les moments de la journée et de cette année. Le jardin prenait discrètement un nouveau visage. A chaque absence de sa mère il partait et revenait avec une découverte. Le jardin petit à petit s’emplissait. Les gents passants à proximité commencèrent à regarder les changements. A chaque saison tout devenait resplendissant. De plus en plus les plantes se mélangèrent. Rentlau observa ces changements et fini par en comprendre le système. Il réalisa lui-même les mélanges cherchant les fleurs, les senteurs et les couleurs différentes.

 

Arrivé à l’âge de quinze le jardin était devenu un point de rendez-vous. Les habitants du village venaient voir les nouvelles surprises qu’il offrait. C’était à chaque fois un enchantement. La notoriété dépassa le village, puis les villages aux alentours. Tous autour de la grande forêt connaissaient dorénavant le jardin et la curiosité de l’enfant aux mains couleur de l’herbe. Tous avaient pu découvrir au moins une fois, une saison, les éclats et la surprise à la lumière de vibrations inconnues. Les parfums également que déployaient, les végétaux, grâce aux croisements étonnaient, enveloppaient enivraient même parfois les visiteurs. La petite porte demeurait en permanence ouverte.

 

Un jour vint une dame âgée. Sa tenue était étrange, ses manières étonnamment délicates. Elle semblait se déplacer en frôlant l’herbe. Elle caressait les plantes qui donnaient l’impression de frissonner sous ce geste. Lorsqu’elle humait le parfum d’une fleur, celle-ci paraissait se courber pour atteindre son nez ou se baisser si elle était sur une branche haute. Elle demanda à Rentlau de l’accompagner à la découverte de son espace végétal et de lui expliquer comment il avait fait.

- « Je ne sais pas trop, j’ai parfois le sentiment d’être poussé pour croiser une plante avec une autre. Mes mains semblent même agir parfois toutes seules. Il me suffit de vider mon esprit et de regarder, de sentir et d’écouter. J’ai commencé à comprendre le fonctionnement et l’intérêt de certaines terres plutôt que d’autres il y a trois ans. Cela m’a permis de développer encore plus la résistance des plantes et d’imaginer d’autres croisements ».

La visite avec cette dame dura toute la journée. Elle ne cessa de l’interroger sur la source qu’il avait utilisée pour créer une plante, sur le type de terreau qu’il avait choisi, sur l’inspiration qu’il avait suivi. Avant de partir, elle lui demanda s’il avait donné un nom à ses plantes.

- « Non, je n’y ai pas vraiment pensé. Pour moi-même, si chacune possède ses propres caractéristiques, je préfère laisser les visiteurs les identifier. Lorsque tout le monde s’entend sur un nom je le garde. »

- « Il se fait tard, je vais devoir rentrer. Je te remercie pour cette visite. Je repasserai à la saison prochaine voir les nouvelles surprises que tu auras imaginées ».

- « Voulez-vous que je vous raccompagne un bout de chemin ? »

- « Rassurez-vous jeune homme je peux me débrouiller toute seule, et je ne voudrais que tu te perdes en rentrant chez toi ».

- « Vous habitez où, je connais très bien le village ? »

- « J’habite dans la forêt, en son centre en fait. »

- « Mais jamais personne n’a habité dans la forêt. Je m’y suis promené de nombreuses fois et je n’ai jamais vu personne. »

- « C’est pour cela que j’y habite, comme cela je suis tranquille. Bonne fin de journée mon garçon et à bientôt ».

 

La vieille dame poussa la porte, Rentlau la ferma. Il la suivi du regard et la vit disparaître derrière les grands arbres en bordure. Elle s’était comme évanouie, happée par la forêt. Il y eu beaucoup de visiteur en ce printemps. Un représentant de l’autorité locale vint quelques jours après cette rencontre. Il visita discrètement le jardin, regarda, huma, toucha puis se présenta. Il demanda un bouquet de certaines fleures expliquant que le bruit d’un jardin très particulier, voir extraordinaire lui était arrivé aux oreilles. Il lui fallait vérifier la véracité du fait puis en apporter des preuves jusqu’à la capitale. Ceci fait le prince de la région viendrait certainement en visite. Il lui paraissait intéressant de décorer le palais avec quelques bouquets pour parfumer les pièces. Sceptique Rentlau ne dit rien, sa mère sourit et salua l’homme à son départ.

Les jours passèrent, quelques semaines au plus. Le soleil d’été commençait à pointer ses rayons de chaleurs. Le jardin avait grandit, les fleurs et les fruits poussaient à foison. La vieille femme revint. Un grand manteau couvrait ses épaules. Il allait jusqu’à ses chaussures grossières, lourdes et couvertes de terre. On aurait dit qu’elle avait parcouru une grande distance en terrain battu par les vents et la pluie. L’habit était sombre et brute. Des taches de boue maculaient sa base et traçaient des étoiles sur ce ciel presque noir. Elle fit le tour du jardin et vint voir le jardinier un peu plus tard.

- « Ce que je viens de voir est vraiment intéressant. Je vous remercie pour ces trésors. Je vous propose en échange de ce petit moment de plaisir de venir voir mon jardin. Il y fait plus sombre, les arbres laissent passer moins de lumière. Je pense néanmoins que vous seriez intéressé. Souhaitez-vous le voir ? »

 

- « Avec plaisir madame mais je ne pense pas que ma mère voudra. Même si le soleil est encore haut je crains de ne pouvoir rentrer après son coucher. »

- « Ne vous inquiétez pas jeune homme, je vais parler à votre mère, restez là et nous partirons après ».

 

La femme se dirigea vers la mère de Rentlau qui était assise sur un banc, à l’ombre. La jeune femme voulu se lever mais la vieille dame l’en empêcha posant délicatement sa main ridée sur l’épaule. Elle se pencha vers elle et lui glissa quelques mots à l’oreille. La mère prit une attitude inattendue et très respectueuse en baissant les yeux pleins d’humilité. Elle adressa un sourire au départ de son ainée, à l’attention de son fils, lui indiquant ainsi sa confiance et son autorisation. La vieille femme s’adressa alors au jeune garçon.

- « J’ai tout arrangé avec votre mère ne vous en faite pas. Nous devons y aller à présent la route n’est pas longue pour quelqu’un de votre âge mais pour moi, j’ai parfois le sentiment que ma maison recule face à mon arrivée. »

 

Ils sortirent du jardin et s’enfoncèrent dans la forêt. Rentlau ne posa pas tout de suite de questions mais ne cessait de regarder cette dame dont, après tout, il ne connaissait rien. Elle avançait d’un rythme régulier, dodelinant joyeusement. Elle semblait à certains moment chantonner un refrain, à d’autres elle disait simplement « un jour je donne, un jour je prends, à moi de décider à qui et quand. » Elle s’arrêtait aussi pour regarder une feuille, caresser le tronc d’un arbre et leur parler comme à un vieil ami. Un sourire édenté éclairait en permanence son visage avec, dans le coin de l’œil, l’air malicieux de quelqu’un qui prépare un surprise ou un mauvais coup. La forêt répondait à ses avances, à ses signes et à son sourire. Le chemin suivait les troncs, les touffes d’herbage et les fleurs. La dame s’arrêtait au virage, au milieu des chemins clairs. Son parcours était comme fléché par ses rendez-vous avec les végétaux. Elle cheminait comme si elle était seule.

Au bout d’un long moment l’adolescent aux mains vertes commença à perdre patience. Il n’avait jamais pénétré la forêt aussi profondément. Les troncs étaient épais, les écorces profondes, marquées et la forêt sombre. Ces colonnes s’élevaient haut au dessus de lui, et la voute feuilletée couvrait l’ensemble du ciel dans une atmosphère pesante. La déclinaison d’ombre et de lumière, de vert, de noir et de marron était impressionnante pour ce garçon qui n’avait jamais quitté la lumière et les repères du bord de la forêt. Il finit par s’inquiéter.

- « êtes-vous certaine du chemin madame. Nous marchons depuis près de 2 heures et tout se ressemble. Nous avons prie tant de tours et de détours que je crains de ne pas pouvoir retrouver notre chemin si vous ne vous repérez plus. Je pense jusqu’à présent pouvoir nous reconduire au village, mais il y a si longtemps que nous marchons que je ne suis pas certain d’en retrouver le chemin. Je ne connais pas cet endroit et personne ne passe jamais par là. Les autres villageois craignent la forêt. Non sans raison puisqu’il est facile de se perdre. Voulez vous que nous rebroussions chemin pour assurer notre retour. Nous pourrions faire une autre tentative demain. Ma mère vous accueillera visiblement avec plaisir. J’en suis certain, à voir comment elle répondit à votre proposition de m’emmener sur ce chemin. »

- « Ne vous inquiétez pas Rentlau, nous sommes presque arrivés. Je souhaitais simplement participer à l’éveil de vos sens et de votre curiosité. Peut-être me suis-je trompée. Manifestement soit vous êtes quelqu’un de très renfermé, soit de relativement passif, dans tous les cas de très mystérieux. Vous réfléchissez beaucoup trop. Laissez-vous aller comme vous laissez aller vos mains dans la construction, la réalisation de votre jardin. Vous découvrirez bientôt d’où vient votre inspiration et comment l’utiliser. Vous pouvez néanmoins, apparemment, encore faire demi-tour, mais je ne suis pas certain que vous saurez faire face aux apparences. La route est longue et la forêt ne vous laissera pas passer comme cela si vous ne savez pas lui parler. Les passages sur lesquels je me suis arrêtée étaient des portes. Si vous ne vous arrêtez pas au bon moment, au bon endroit, avec les bons mots, vous risquez de tourner un certain temps. »

-« Autrement dit je n’ai pas le choix. »

- « Vous avez toujours le choix, quoi que vous fassiez, au plus simple, ou au plus compliqué. Tout est de savoir quoi faire ou de ne pas faire. Que voulez vous faire, jeune homme aller ou retourner ? Sachez que la vie est ainsi, mais dans la vie aller est le seul choix. Il n’est jamais possible de retourner. Que voulez vous faire ? »

- « Je préfère aller, mais je vais essayer de me repérer au mieux on ne sais jamais. »

- « Croyez vous que dans la vie vous ayez un vrai choix. Vous ne savez pas voir, c’est tout et cela n’ira que de mal en pis.  Suivez moi vous ne risquez rien, mais restez sur vos gardes, ceci est une attitude intelligente et consciente. Agissez toujours ainsi et vous deviendrez un homme, un vrai.»

Le chemin lui parut encore long. La forêt se faisait vraiment dense, sombre, silencieuse. Alors qu’ils arrivaient dans ce qui pouvait être le centre, une lueur au bout d’un chemin à peine tracé se montrait. Rentlau découvrit une petite clairière. Les maigres rayons de soleil que réussissaient à percer la cime des arbres rasaient le sol jusqu’à la porte d’une chaumière.

C’était une cahutte faite apparemment de boit et couverte de feuilles de vigne, de lierre et d’autres végétaux avec des fleurs blanches et bleues que Rentlau ne put identifier. Elle ne paraissait pas très grande au pied d’un arbre immense comme il n’en avait jamais vu. Le tronc était large, noueux et ses racines, comme éclatées partout autour du fût, s’enracinaient en tous sens. La maison laissait imaginer qu’elle fut construite avant que l’arbre ne fut planté. Avec sa croissance, il avait envahit l’espace emprisonnant l’habitat. La nature avait repris ses droits et bloqué le maigre logis.

La chaumière semblait véritablement écrasée par l’arbre contre lequel elle s’appuyait. Une simple porte, allant presque jusqu’au bord du toit assurait l’entrée. Elle n’était pas fermée et tenait par miracle attachée par deux morceaux de cuir ou de corde. De part et d’autre, deux petites ouvertures assuraient vraisemblablement l’éclairage de la petite pièce intérieure et sa ventilation. Deux grossiers volets de bois brut bouchaient les orifices pour la nuit et pendaient presque tristement de chaque côté. C’était un assemblage à l’identique de la porte de buches plus ou moins longues liées les unes aux autres. Le mur faisait penser à un mélange de racines et de glaise. Le toit était couvert de terre et de plantes. Etait-ce de la chaume, le temps en avait presque effacé les traces. Il pouvait s’écrouler sous ce poids à tout moment. Une cheminée minuscule, faite d’écorces, dépassait en son milieu.

La largeur de la maison était inférieure au tronc coincée entre deux racines proéminentes. Tout était écrasé par ce monstre végétal dont la tête était invisible tant les grosses branches du bas cachaient le reste et le ciel. Elle lui parut minuscule.

Les arbres, face à l’entrée, formaient un cercle. Ils semblaient plus jeunes car moins hauts et moins gros. Tous présentaient, néanmoins, les traces d’un âge respectable. La ronde qu’ils formaient ne semblait pas très large, tant celui du milieu était important, simplement en harmonie avec l’ensemble de ses composants : La maison, l’arbre qui la soutenait, et le cercle. Tout était paisible et en accord. Le seul reste de lumière que pénétrait cette presque clairière pointait l’entrée de la petite construction. Tout ceci paraissait déplorable pour une dame aux apparences aussi âgée, comme si, depuis des années, elle n’avait pu entretenir ce lieu. De petites fleures blanches et délicates parsemaient les environs de l’entrée et se répandaient parmi la végétation de al clairière. Une coulée d’herbe traçait le chemin d’accès à la porte. Rentlau s’arrêta un instant pour respirer. Il prit le temps de contempler le paysage presque irréel et tellement paisible. Il sembla comprendre, l’espace d’un instant, pourquoi cette vieille femme restait là. Ce lieu semblait si calme, si immobile qu’il ne pouvait convenir qu’à une personne d’un tel âge. Il lui inspirait tellement une histoire, aujourd’hui révolue. Le temps s’était arrêté en cet espace et attendait quelqu’un ou quelque chose. L’adolescent suivit le chemin d’herbe et se retrouva rapidement sur le seuil.

La vieille dame était assise au coin de la cheminée et regardait de son coin Rentlau et ses yeux étonnés. Une petite flamme dansait dans l’âtre. De l’autre côté de foyer, il y avait, bizarrement posée une petite porte. La pièce était en effet minuscule. Les murs intérieurs étaient les racines du grand arbre. Une simple table, un lit de paille, sa cheminée et son fauteuil composait l’essentiel ou presque de son mobilier. Il y avait juste l’espace suffisant pour une personne de circuler entre chaque élément. A droite de l’entrée un tonneau fermée et une louche en bois posée dessus et à gauche un petit meuble complétaient le reste de l’équipement domestique.

- « Bienvenu chez moi. Souhaites-tu un peu d’eau pour te désaltérer ? Après un si long parcours tu dois avoir soiffe. Si tel est le cas, regarde à ta droite, devant la fenêtre. Ouvre la couvercle de bois du tonneau. L’eau y est fraiche. ».

Rentlau saisit la louche. L’ombre montrait un liquide trouble et sombre. Il plongea l’ustensile et en sortit une louche pleine. Il la leva jusqu’à ses lèvres, hésita un instant. La soiffe était plus forte. Le liquide s’engouffra dans sa bouche. Il sentit le trajet de l’eau fraîche descendre jusqu’à son estomac. Jamais il n’avait éprouvé autant de plaisir dans une seule gorgée. Sa fraicheur, sa douceur gustative l’émerveilla comme s’il buvait à la source première de toute les eaux douces. Cela lui apporta un réconfort inattendu.

 

- « Voici une eau bien réconfortante n’est-ce pas ? L’arbre qui soutient ma maison est composé de milliers de feuilles. Chaque matin chacune reçoit une goute de rosée et me la donne. Je ne bois que cette eau, il n’y en a pas de plus douce. Qu’en penses-tu ?»

- « Elle est effectivement légère et surprenante. Je me sens réconforté. Le jardin que vous souhaitiez me montrer est-ce celui qui se trouve à l’entrée ? »

« Non, il est derrière, mais il est un peu tard pour le visiter. Je te propose d’attendre demain matin. C’est le plus beau moment, quoiqu’il en soit pour voir les fleurs éclore. Je te propose de nous restaurer un peu. Peux-tu m’aider mes vieux os me font souffrir ? »

- « Que puis-je faire ? »

Elle lui indiqua la marche à suivre pour dresser la table pendant qu’elle accrochait une petite marmite à la crémaillère. Ils passèrent vite à table alors que l’obscurité grandissait. Elle s’assit à un bout de la petite table et lui en face de sorte qu’ils avaient la porte et la cheminée à leur côté.

 

- « Tu es étonnant. Tu m’as suivi sans poser de question. Une fois arrivé tu as mis un petit temps à entrer dans la clairière et pour finir tu ne sais même pas qui je suis, ni mon nom. Nous ne nous connaissons pas. Suis-tu toujours les personnes âgées en leur faisant confiance ? Je t’ai proposé de venir voir mon jardin et au lieu de cela nous dînons ensemble et tu n’as rien vu. »

- « Disons que les plantes m’ont appris la patience et un peu la confiance. Je reste vigilent mais j’aime les découvertes. Je sais qu’elles arrivent en leur temps. Si vous m’avez amené jusqu’ici c’est que cela vaut probablement la chance de voir et d’apprendre. Vous semblez vous intéresser aux végétaux. C’est au moins un point commun que nous pouvons partager. Ma mère a eu une attitude très respectueuse et a consenti à me laisser partir donc si elle me fiat confiance, je vous fais confiance. »

- « Voici une belle réponse. Tu es un peu avare de mots et je m’en contenterai. Je suis de toute façon tellement habituée au silence et aux bruits de la forêt que je ne pourrais pas m’en plaindre. »

Le reste de la soirée se passa en discussion sur leurs vies respectives, leur approche des plantes. Rentlau allant se coucher dans un coin aménagé à même le sol sur un lit de mousse. L’humidité était présente mais il ne faisait pas froid. Il dormit paisiblement.

Le soleil était à peine levé que la vieille femme le tira de ses songes.

 

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25 avril 2006 2 25 /04 /avril /2006 11:37

 

La boîte

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

Une boîte ne peut être qu’une boîte ou, tout au plus, tout dépendant de ce que l’on y place, de la place qu’on lui donne et de la place où elle est entreposée. Aujourd’hui nous avons des boîtes pour tout et des boîtes partout. Elles sont en carton, en plastique et quelques unes s’offrent le luxe d’être en bois. Dans les belles boîtes sont entreposées, réservées ou cachées de belles choses, des objets de valeur, les choses auxquelles nous tenons.

 

 

 

 

J’étais dans ces régions perdues, ce monde du bout du monde autrement appelées les régions du centre de la France. Il y demeure quelques touts petits villages au milieu de grands champs et de très grandes forêts, autre fois encore plus grandes. Pour découvrir ces villages et leurs spécialités c’est facile. Prenez l’autoroute, puis une nationale, puis une départementale, et enfin une route à gauche ou à droite à partir du moment où elle est plus petite que la précédente. Pour vous diriger, suivez les panneaux bleus, puis les verts puis les blancs, enfin les marrons lorsqu’il n’y en a plus vous n’êtes plus très loin de votre destination.

Si vous êtes en voiture prenez soin de faire le plein, de vérifier vos pneus, les suspensions et les essuies glaces. Vous saurez que vous approchez du bon endroit lorsqu’il n’y aura plus âme qui vive si ce ne sont celles habitués aux grands espaces, à la nature originelle de ces forêts aujourd’hui tronquées. Si le temps le permet roulez doucement, vous n’avez pas d’autre choix quoiqu’il en soit, mais fenêtre ouverte. Respirez, écoutez c’est très relaxant pour entrez à la découverte de ce monde si particulier. Cela vous permettra au moins de mettre en marche votre boussole interne car les autres sont inutiles et le téléphone ne passe pas non plus. Remarque à l’attention de l’IGN, il y a beaucoup de manques dans le tracée de certaines routes qui ne paraissent pas sur leurs cartes.

 

 

 

 

Chaque village perdu que vous pourrez croiser possède son artisanat, ses spécialités ou sa particularité. J’ai traversé un village désert constitué par moitié de maisons en pierres ocres et l’autre moitié de lavoirs aux toits de chaumes marrons et aux quelques mures et piliers blancs et bleus. Pour plus de la moitié des lavoirs aucune rivière ne coulait ou ne semblait jamais avoir coulée. Comme s’ils avaient été posés, soit en dépôt soit en attente d’un cours d’eau ou d’une source ou encore que le projet n’avait pas eu lieu.

Un autre village, lui, possédait un plant d’eau à chaque maison et chacun avait son ponton, sa barque quelle que soit la taille du plant d’eau qui n’avait aucune corrélation avec la taille de la maison, et surtout ses signes. Des signes partout qui allaient d’une marre ou d’un étang à l’autre et aucun signe de vie, pas d’habitants. Les lieux étaient entretenus parfaitement mais personne dans les environs pour me renseigner. Seul les signes créaient l’animation et les discours. Un soir en repassant plus de signes mais la population avait envahi les espaces. Certains assis sur leur ponton lisaient un journal, semblaient boire quelque chose, pêchaient. Les autres, dans les barques, faisaient des ronds dans l’eau. Les enfants allaient d’une pièce d’eau à une autre. Le village d’après possédait un grand nombre de volière mais peu demeuraient occupées. Il faut dire que toutes les porte étaient ouvertes lorsqu’elles ne manquaient pas et que les seules oiseaux présents, parfois très beaux, dormaient, picoraient ou se désaltéraient.

 

 

 

Je me suis arrêté au final, dans un village constitué peut-être d’une vingtaine de logis tous à la structure semblable. Les maisons étaient une déclinaison du carré. Les quatre murs avaient la même forme, la même taille de carré. Imaginez des cubes et si une maison était plus grande que celle du voisin c’était parce que le carré de base avait des arêtes plus grandes. On devinait alors qu’elle comportait deux étages car les fenêtres du deuxième, carrées elles aussi, formaient les quatre coins d’un carré avec celle du dessous. Chaque fenêtre comportait quatre ou seize carreaux de verre, parfois de couleurs différentes. Les toits étaient en triangle isocèle mais les tuiles étaient carrées. On entrait visiblement par quatre routes possibles dans ce village et toutes arrivaient en droite ligne sur la place du village. La place était carrée, quatre arbres à chaque coin habillaient l’ensemble et ombrageait le kiosque cubique au toit pointu comme la flèche d ’une église. Les arbres étaient d’essences différentes. Il y avait le coin des quatre chênes, celui des quatre frênes, en face quatre marronniers et quatre érables achevaient la composition.

Le restaurant encore ouvert dans ce milieu d’après midi s’appelait le carré des quatre amis. Le choix au menu était un peu léger. Quatre entrées possibles, quatre plats et quatre desserts constituaient la carte. Pour seize euros tout compris on avait même droit à volonté à un vin local, le carré de vigne du coin. Cela dit c’était le meilleur carré de mouton que j’ai mangé depuis longtemps. Le repas fini je choisis de me promener à la recherche d ’angles de vue intéressants pour prendre des photos. On se permet vite lorsque tout ou presque ressemble à l’angle de la rue que l’on vient de quitter. Je me retrouvais alors face à la seule boutique du village, le fabricant de boîtes.

 

 

 

Sa grande vitrine carrée exposait, et ce depuis certainement longtemps à en juger par la poussière ou la décoloration des vernis, une quantité intéressante de boîtes de toutes tailles et de toutes les couleurs.

Alors que j’entrai un homme me salua en sortant de derrière ou dedans une énorme boîte en bois comme diable sort de la sienne. Ce n’était pas à proprement parler un bonjour ni un salut mais un holà ! Qui me fit sursauter. Il me toisa, j’en fis de même et me demanda, l’air étonné ce que je pouvais lui vouloir.

- C’est pour quoi ? Vous n’êtes pas du coin vous, cela se voit, que venez vous faire par ici, y’a jamais beaucoup de monde qui passe par ici, surtout à cette saison …

Il continua son débit d’évidence en passant par le temps qu’il fait et qui change en permanence, que cela le contraint à ne plus savoir comment s’habiller mais que de toute façon c’est pas grave parce qu’il habite au dessus de sa boutique, mais que lorsqu’il sort, il perd du temps à aller ce changer et j’en passe.

 

 

 

Je réussis à l’interrompre lorsqu’il repris son souffle.

- Toutes ces boîtes sont à vendre ?

- Bien évidemment je ne suis pas collectionneur

- Cette énorme boîte également. Lui demandais-je

- Ben oui, cela aussi.

- C’est une commande spéciale ? Il faut dire que l’on pouvait y mettre un cheval dans sa boîte. Je ne voyais pas l’intérêt d’un tel format. Le principe d’une boîte n’est elle pas de déplacer un ensemble de choses en même temps.

- Je la nettoie pour le mettre en vente, la grosse là, avant j’y mettais mes boîtes. Mais maintenant que je ne fabrique plus faut que j’vende.

 

 

 

Il n’avait pas l’air très vieux et il ne fabriquait plus. Je n’aurais pas pu dire son age mais il ne devait pas avoir plus de dix ans de plus que moi. Un peu tôt pour arrêter ou fermer un commerce.

 

 

 

- Vous ne fabriquez plus parce que vous en avez trop ou prévoyez-vous de fermer votre magasin ? lui demandais-je.

 

 

 

- Non faut attendre que les arbres poussent. Après je m’y remets.

- Mais un arbre cela prend du temps pour pousser selon les essences cela peut prendre du temps.

- C’est pas grave je ne suis pas pressé. Me répondit-il.

 

 

 

Je commençai alors à chercher dans cet amas de boîtes carrées celle qui pourrait me plaire. Lui retourna dans sa boîte en disant « surtout appeler moi si vous avez besoin d’aide mais ne mettez pas le bazar, parce que si non faut qu’je range et si vous casser quelque chose vous payez. » et il disparu me laissant dans l’enchevêtrement, l’amas, les colonnes et les murs de boîtes.

 

 

 

De l’extérieur on ne l’aurait jamais cru, mais le magasin était un hangar immense où les tas de boîtes s’enchaînaient les uns après les autres, les unes dans les autres. Cela allait de la boîte au sein de laquelle un gris de riz pouvait à peine rentrer à celle ou non seulement le cheval de tout à l’heure mais aussi le pré pour le mettre dedans.

Je cherchais pour ma part un boîte en bois pour ranger mes photos voir les négatifs. Quelque chose d’hermétique et de jolie mais non pas certains de ces modèles mélangeant les essences et faisaient penser à un éclat de couleurs et de nervures assez laids, kitch au mieux.

 

 

 

Probablement deux heures plus tard, et assez las de ce bric à brac, mon choix c’était arrêté sur deux modèles de taille moyenne. La première semblait assez vieille, la patine du temps lui apportait un voile séduisant laissant deviner son contenu, des souvenirs de grand même. L’autre un peu plus récente et luisante avait une jolie couleur de bois. J’essayai de retrouver mon chemin au sein ce dédalle et me retrouvai devant la grande boîte où le diable de tout à l’heure avait replongé.

 

 

 

Excusez-moi de vous interrompre, pourriez vous me donner le prix de ces deux boîtes s’il vous plaît ? Pas de réponse. Hello !!. Toujours pas de réponse.

- Vous avez besoin d’un renseignement ? dit une voix derrière moi. Alors que je me retournai je ne vis personne.

- Plus bas dit la voix.

Effectivement il y avait là un petit homme, habillé bizarrement qui me regardait à travers de toutes petites lunettes carrées, la barbe coupée droite lui faisant un rideau carré sous la bouche.

- Je cherche le monsieur qui était dans la boîte tout à l’heure. J’aurais souhaité connaître le prix de ces boîtes.

 

 

 

Me les prenants des mains il annonça que la premier, la plus vieille, n’était pas à vendre. Elle lui venait de son père et lui servait de modèle pour ce format de boîte. Quant à la deuxième il voulait bien me la céder mais il fallait lui dire ce que je voulais en faire.

J’en ferai bien ce que j’ai envie d’en faire me dis-je. Il voudra quoi après que je lui signe un contrat.

- Pas besoin de contrat, m’interrompit-il dans mes pensées, c’est juste que toutes les boîtes que vous avez regardées toute l’après midi ne sont pas que des boîtes. Elles sont un peu plus que simplement cela. Et ce que vous faites de ce que vous acheter me regarde, je suis responsable de la bonne utilisation de ce que je fabrique.

 

 

 

- Je pensais que c’était l’autre personne qui fabriquait les boîtes qui ne sont pas des boîtes, qu’il avait arrêté la production pour laisser pousser les arbres.

 

 

 

Il me regarda par-dessus ses verres et me répondit qu’il était parfois seul dans la boutique, parfois non. Que ces boîtes ont d’autres intérêts que la conservation de choses inutiles.

- Une boîte n’a de valeur que par rapport à ce que vous mettez dedans. J’ai même entendu dire que certains y mettaient des bijoux voir des cigares. Mes boîtes, qui ne sont pas que des boîtes sont des enveloppes. Elles filtrent, font grandir ou disparaître les choses. Elles les bonifient parfois aussi. Celle que vous avez choisie était la boîte à idées et mesures de mon père. Lorsque j’ai besoin d’un plan, d’une mesure ou d’une idée je l’ouvre. Si non elle reste fermée et vide. Il ne faut jamais regarder une boîte seulement pour connaître son contenu. La deuxième que je peux vous vendre est une boîte à souvenirs. Mais quels souvenirs voulez-vous y déposer ? Les bons souvenirs resterons et deviendront encore plus beaux et grands pour vue que vous ouvriez régulièrement la boîte qui n’est pas qu’une boîte. Si ce sont de mauvais souvenir il ne faudra que les déposer mais jamais ne l’ouvrir car ils deviendraient plus durs, plus pénibles et envahissants. Il faudrait également alors que je vous vende une boîte à boîtes qui fait disparaître les boîtes qui ne sont pas que des boîtes. Puis ensuite il vous faudrait la boîte qui fait disparaître les boîtes qui font disparaître les boîtes qui ne sont pas que des boîtes. Et ainsi de suite pour finir par la boîte qui est derrière vous. C’est la boîte à boîtes que ne sont pas que des boîtes et qui fait tout disparaître même parfois celui qui nettoie la boîtes en attendant que les arbres poussent. ».

 

 

 

 -Vous êtes très amusant monsieur mais les photos ne sont que ce qu’elles sont, c'est-à-dire un moment, un paysage, une lumière. Les photos sont neutres ce sont les gens qui les regardent qui leur donnent leur bon ou mauvais côté. Je cherche une boîte qui soit plus ou moins une boîte pour les mettre et les protéger.

 

 

 

- Alors la boîte qui n’est pas qu’une boîte pour les souvenirs peut très bien vous aller mais je vous aurais prévenu. Au pire équilibrer les bons et les mauvais clichés, les bons et les mauvais souvenirs de sorte que je n’ai pas à venir vous livrer la grosse boîte qui n’est pas qu’une boîte pour faire disparaître les boîtes qui ne sont pas que des boîtes. »

 

 

 

Je négociai un peu le prix. La boîte était belle et avec l’économie je me pu me payer de l’aspirine. Il m’avait donné une certaine migraine avec ces histoires de boîtes qui ne sont pas des boîtes et patati et patata. Avant de partir, je lui demandai pourquoi tout semblait si carré autour de lui. Je crains au moment où je lui posai la question, qu’il me réponde que cela était dû à ses lunettes qui, elles, l’étaient.

 

 

 

- Pas du tout me répondit il en me coupant une fois de plus dans mes pensés. Si je me mettais à faire des boîtes rondes les souvenirs, les idées et toutes les autres choses que vous pouvez mettre dedans tourneraient en rond. Elles ne grandiraient pas ou deviendraient folles ou incontrôlables. Si je les faisais rectangulaires, elles seraient disproportionnées dans une longueur. Enfin si je les faisais triangulaires elles seraient trop stables, et surtout trop pointues. Ce n’est pas bon d’être trop pointu précis oui, pointu non.

 

 

 

Sur ces bonnes paroles, je quittai le lieu en le remerciant et en le saluant. Alors que je passai près de la grande boîte qui fait plein de choses et surtout me donne la migraine, j’entendis une voix qui disait « le chêne forcit. Le frêne aura des glands. Le marronnier fera des marrons marron et l’érable qui sirote aura du sirop. Mais les marrons c’est pas sur la voiture qu’ils doivent être » Je jetai un œil au dessus de la boîte discrètement mais ne vit rien. Le petit homme descendit de son comptoir. Et me rappela que la droite est bien, la gauche parfois mieux et que tout droit c’est plus court.

 

 

 

Merci et au revoir.

 

 

 

La nuit allait tomber. Il me fallait retrouver ma voiture. Je connaissais la rue à gauche et très probablement celle à droite. Je n’avais pas vu celle tout droit. Puisque c’est plus court, comme il avait dit, j’allais tout droit. Tout droit ce fut effectivement plus court. Je retrouvais facilement ma voiture au coin de la place. Quelques marrons avaient fait des bosses sur le capot.

 

 

 

Je retrouvais les routes, les villages, les signes absents, les lavoirs sans eaux, les routes sans panneaux, celles avec. Avant d’arriver aux panneaux bleus je me suis arrêté dans un hôtel. Je l’ai choisi proche de l’autoroute, cela me sembla plus prudent. J’ai posée la boîte sur le lit et me suis demandé ce qu’au final j’allais en faire.

 

 

 

 

Une boîte à souvenir qu’est-ce que c’est au final. C’est un récipient qui, lorsqu’on le regarde nous rappelle ce qu’elle contient. Mais ce n’est qu’une annexe neutre des instants passés. Il faut y mettre des choses dedans, des photos, des rubans, des fleures séchées ramassées le long d’un chemin un été. Lorsque ces souvenirs deviennent trop vieux, on range la boîte dans une armoire, et un jour où ces souvenirs sont épuisés, nous faisons le vide dans l’armoire et dans la boîte. Si elle est assez jolie, nous les remplaçons ces souvenirs avec d’autres plus vieux et le cycle recommence.

 

 

 

Notre mémoire est une boîtes qui n’en est pas une. Il faut des boîtes qui contiennent des boîtes pour contrôler la croissance de nos souvenirs. Et il faut une boîte très grande qui contienne toute les boîtes que nous appelons notre tête. Nous passons à côté ou au milieu de beaucoup de choses, parmi des personnes ou des aventures.

 

 

 

Parfois nous rencontrons des personnes que nous croyons être de signes, et lorsque l’angle de vue ou que la lumière de la vie change ils ne sont que de simples hommes ou des enfants expérimentant les différents aléas de la vie. L ’eau est-elle plus chaude ou plus froide à côté ? Nous vivons des expériences pouvant nous paraître sans intérêt comme des cages à oiseaux sans portes ou aux portes ouvertes. Les seules activités ou signes d’activités, aussi belles soient elles ont-elles ou non de l’intérêt. Une cage à oiseaux doit elle contenir immanquablement un volatile ou peut-elle être un espace de repos pour ceux de passage comme un temps dans la vie où tout semble endormi, immobile.

Nous voulons parfois construire de grandes et belles choses, apporter un maximum d’affection ou de soutient à ceux qui nous entourent. Mais lorsqu’ils ne sont pas prêts, que le terrain ne s’y prête, nous devenons des lavoirs sans eaux. Comme nous nous sentons inutiles en attendant que la pluie arrive et qu’une rivière se forme.

Alors nous allons chercher à devenir le plus carré et le plus simple possible. C’est l’évidence qui prime, la rigueur mathématique, la dualité absolue. C’est noir ou c’est blanc. C’est carré. Nous sélectionnons, trions, entreposons, classons et rendons tout à sa plus simple expression qui l’est mais qui ne l’est pas tout à fait quand même. Nous allons même parfois jusqu’à rejeter ce qui ne cadre pas ou passe hors champs de nos conceptions.

Rien n’empêche de temps en temps de se prendre des marrons bien que tout droit ce soit plus court, à droite c’est bien parce que raisonnable mais qu’à gauche parfois c’est mieux parce que plus agréable, c’est le cœur.

 

 

 

Alors que faire de nos souvenirs source de nos devenirs. Que faire des rythmes, des évènements, des autres que nous croisons, que nous croyons voir ou entendre. Faut-il être grand dans une seule boite ou petit au milieu d’une multitude d’autres.

 

 

 

J’ai une certitude. La boîte à mémoires, qui n’est pas tout à fait une boîte que vous avez devant vous, remplissez la. Mettez y, chacun d’entre vous, une partie de votre mémoire de cette année. Mettez le signe d’un souvenir personnel et celui d’un souvenir vécu en commun, le tout à l’attention de chacun. Mettez de la part de tous ce qui vous rapproche comme ce qui fait que chacun est, vie et agit en toute individualité. La boîte qui contient toutes les boîtes s’occupe de ce qui fait mal aujourd’hui pas demain. La boîte à mémoire travail pour demain.

 

 

 

Vous verrez en l’ouvrant, à Noël prochain, que cette boîte n’est plus vraiment une boîte. Elle est en plus une mémoire devenue collective. C’est la brique et le ciment qui vous réunit, qui vous unit. Ne cherchez pas non plus à la remplir du premier coût. Laissez de la place pour l’année prochaine, et l’année prochaine et l’année prochaine …. Ne mettez que cette substantifique moelle de votre année à tous. Et revivez les l’années prochaines, simplement en l’ouvrant. Les mauvais souvenirs vont s’estomper, vous ne garderez que les bons.

 

 

 

 

 

 

Lorsque la boîte qui n’est pas une boîte sera pleine,

Chacun la remplira, autre part sans peine

Et avec un peu de chance et autrement,

Elle vous accompagnera tout le temps.

 

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