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28 mai 2006 7 28 /05 /mai /2006 01:06

-« Il est temps jeune. Le soleil est sur le point de se lever. Vous ne voulez pas manquer cela. Debout ! »

 

Rentlau fut surpris dans son sommeil. Il avait éprouvé quelques difficultés à s’endormir. La marche l’avait épuisé mais il était un peu déboussolé. C’était la première fois qu’il dormait en dehors de chez lui. En fait, s’était la première fois qu’il sortait du village, de sa maison et qu’il quittait sa mère pour plus de quelques heures. La pièce était encore sombre et, comme au moment de se coucher, une maigre flamme ondulait dans l’âtre comme une veilleuse. La vielle femme versait de l’eau chaude dans des tasses faites de bois. Il se frotta la tête, les yeux, bailla et jeta le drap de fibres végétales qui lui avait servit de couverture. Elle était fine et rêche mais elle lui avait tenu chaud et protégé de l’humidité. Il se leva et alla s’assoir à la même place que la veille.

Des feuilles dansaient dans le fond des tasses, l’eau prit une couleur sombre. Le goût était fumé, fruité un peu amer.

- « Je n’ai jamais bu une telle infusion qu’est-ce que c’est ? »

- « C’est une plante que je fait pousser un peu loin d’ici. Des amis me l’apportent régulièrement. Avec l’eau de l’arbre c’est un vrai délice. J’ai envie de l’appeler tshae. Qu’en penses-tu ? »

- « Pour quoi tshae ? Qu’est-ce que cela veut dire ? »

- « Pas grand-chose en vérité, pour le moment. Mais c’est le seul nom qui me restait. C’est la dernière plante que j’ai trouvée. Le problème est qu’elle ne peut pousser que dans certaines conditions qui sont difficiles à réunir ici. Dépêchons-nous nous risquons de manquer le spectacle »

Rentlau fini de boire sa tasse de tshae et de manger un amalgame étrange, sentant le grain des herbes hautes et fines qui deviennent jaune en été.

- « Et cela qu’est-ce que c’est ? »

- « Je fais cela à partir des graines au bout des herbes une fois jaunies par l’été. Je les réduis en poudre. Je mes de l’eau et du sel et un mélange de mon invention qui fait lever la pâte. Une fois assez haute, je cuis le tout au four. Je l’ai appelé pain parce que la première fois que j’ai essayé de faire lever la pâte il y a eu des bulles et cela à fait « pain ! » lorsqu’elles ont explosé ».

Ils sortirent de la maison. L’herbe du chemin et les fleures se trouvaient maculées de rosée. Une légère brume ondulait au dessus d’elles. Le cirque d’arbre délimitait l’espace entre ombre et lumière entre leur cime et le ciel.

Ils contournèrent les larges racines. Rentlau découvrit que derrière un espace impressionnant s’ouvrait sous le ciel encore étoilé. La cime des arbres séparait la voûte bleue nuit d’une masse noire en direction du sol. Plus bas encore, un amas semblant incroyablement grand mais imprécis, jonchait le sol. Le ciel s’éclaircissait peu à peu et laissait deviner des formes, des courbes, des enchevêtrements imprécis.

Un vol d’oiseaux perturba l’éclat des dernières étoiles, un parfum, humide et riche s’éleva du sol. La vieil femme pris la parole à mi voix. « Regarde, sens et écoute. La nature se réveille tu va voir et sentir ce que peux peuvent découvrir. » Le ciel déjà se paraissait d’une lueur bleu, du noir du sol renaissaient des verts. La nature doucement réveillait ses couleurs diurnes et frémissait, comme sous une caresse, à l’apparition de la lumière. Les sons, la vie du jour émergeaient. Devant les yeux de Rentlau, dos à l’arbre et au centre du cirque végétal le spectacle pris forme en musique.

Les premiers rayons de soleil soulignèrent la crête des arbres. Un vert profond et dentelé accueilli en frémissant sous la première brise cette toute première chaleur. Le rayon descendit doucement et révéla les troncs. Il toucha ce qui résidait au sol. Dans un premier temps de longues feuilles vert clair attrapèrent la lumière et semblèrent se dresser sous cette douceur. A sa droite Rentlau découvrit sous ce nouvel éclairage, ce qu’il n’avait pu voir quelques secondes auparavant. De grandes tiges vertes, des boutons de fleurs, des arbres et des arbustes occupaient l’espace. L’angle lumineux s’étendit vers sa gauche comme pour n’éclairer que le cirque de verdure au sol. Il pouvait deviner sa progression à vue d’œil. Alors que les premiers bourgeons éclairés commençaient à éclore, à sa droite les grands arbres résidaient encore dans l’ombre. Lorsque tout le sol fut illuminé, le jeune garçon découvrit le deuxième acte du spectacle. Le soleil à sa gauche et la lune disparaissant à sa droite achevaient le tableau. Les premières fleurs réveillées s’ouvraient pour recevoir cette manne du nouveau jour. Une bouffé de parfums s’élevait avec un jeu de couleurs incroyables à ses yeux. Des blancs, des jaunes, des rouges des bleus et des mélanges, toutes les couleurs de l’arc en ciel avaient pris place dans les fleurs, les feuilles et les fruits du grand jardin dont la taille se révélait. L’espace était immense, où que son regard se porta il découvrait un diapason inconnu de forme et d’harmonie. Les lucioles s’étaient couchées mais tout un monde diurne fêtait l’arrivée de le l’astre solaire. La brume et l’humidité disparu, les insectes multicolores prirent leur envole. Des papillons de tailles, de formes différentes jouaient dans les rayons lumineux. Des libellules, des scarabées, des oiseaux s’envolèrent ouvrant une voie vers le ciel au bleu devenu claire et limpide. Si le couple de la création légendaire, dont lui avait parlé sa mère, avait réellement existé, ils auraient vécu au milieu de ce jardin extraordinaire. Le sien lui parut d’un seul coup insignifiant, pauvre et sans intérêt. Le jeune homme resta bouche bé tous ses sens recevaient des messages encore incompréhensibles. Il se sentit perdu tellement les messages arrivaient de tout côté en touffe, sans ordre, avec une force jamais égalée. Son regard ne savait pus où se poser. Tout se mélangeait avec une presque violence. La vieille femme le saisit fortement par le bras et le tira de son hypnose.

- « Attention jeune homme, si vous plongez sans préparation dans cette richesse vous risquez de vous perdre. Laissez-moi vous guider et vous apprendre. Je vous avais aider à aborder les jeux de la nature et toute sa puissance, sa magie et surtout toute sa force d’amour créatrice. Ensuite vous pourrez agir avec elle. C’est un peu violent au premier regard mais une fois que vous connaitrez ses mystères, son fonctionnement, vous pourrez trouver l’harmonie qui sommeille en vous et surement répondre à la question que vous vous posez depuis si longtemps. Pourquoi des mains de cette couleur ? Vous comprendrez alors que la réponse ne réside pas dans les mains mais dans le cœur qui les anime. Allons nous promener vous les vous, je vais tout vous raconter.  »

Ils parcoururent les allées, s’arrêtant à presque chaque végétal inconnu du jeune homme. Ce parcourt leur pris la journée sans que l’un d’eux ne paru fatigué. L’ombre des premiers arbres déjà s’allongeait sur le sol. Ils arrivèrent au pied du grand arbre. Rentlau avait la tête chargée de nouvelles informations et de nouvelles idées. Il se sentit comme surexcité, envahit d’une nouvelle énergie et d’un potentiel de création insondable. Un tel potentiel le submergea. Son regard plongea à ses pieds. Il découvrit une chose qu’il n’avait jamais vue. Elle était rouge parsemée de grain à espace régulier. Sa forme était faite de courbe et ne dépassait pas la largeur de son pouce. Les feuilles de la plante étaient larges et des filaments verts unissaient l’ensemble.

- « Puis-je vous poser une dernière question et savoir ce que c’est que cela ? » demanda le jeune garçon.

- C’est un fruit. Je crois tout du moins. Je l’ai appelé fraise car lorsque l’on récolte plusieurs d’entre elles dans un même récipient, elles ressemblent aux braises de la cheminée. Je ne pouvais pas les appeler brais car elle ne son pas chaudes, ni piquantes. J’ai donc changé une lettre. Goûte, tu me diras ce que tu en pense. « 

Il cueillit au pied du très grand arbre la seule qui apparaissait non cachée par ses feuilles et qui était demeurée au soleil toute la journée. Son rouge était vif. L’équilibre de ce qui ressemblait à des pépins, mais à l’extérieur, représentait un parfait équilibre. Ses formes arrondies en forme de cœur offraient une promesse de douceur. L’harmonie de leur distance semblait exacte. Il la porta à son né dans un premier temps pour deviner ou appréhender le goût de cette découverte. Le parfum était léger et timidement sucré. Entre ses doigts il entait déjà la douceur dû à l’exposition aux rayons de soleil d’une journée entière. Il porta le fruit à sa bouche et planta ses dents. Immédiatement une bouffé de parfum et de douceur envahit sa bouche. Il mâcha doucement et senti son palais inondé de sucre tendre et de ce qui faisait la spécificité de ce végétal. Il fut submergé par lui en un instant. La chair déjà descendait dans sa gorge mais gardait toute sa puissance. La première partie du fruit révélait encore sa richesse alors que sa bouche était vide. Comme émergeant de son ventre il devinait la présence du fruit. Une deuxième bouffé acheva l’existence du fruit. Il plongea Rentlau dans une extase. Il n’avait jamais rien mangé de semblable. Qu’un fruit pusse avoir un tel pouvoir sur les sens le fit frémir, une telle force lui fit presque peur, il cru que plus aucun fruit ne pourrait avoir de saveur à ses yeux et surtout en son palais. Lorsqu’il rouvrit les yeux le soleil était couché et le froid et l’humidité gagnait jusqu’à travers ses vêtements.

- « Réveille toi, tu vas prendre racine. Ce fruit est particulier, le soleil à fait son œuvre mais nous devons penser à rentrer. « 

 

Rentlau se retourna vers la vieille femme tout encore étourdi puis plongea, étonné, son regard vers le jardin. Toute la magie des plantes, de la journée, avait disparu absorbée par les ombres de la nuit. Tout était immobile. Seules quelques lucioles animaient comme des étoiles filantes les formes imprécises, la dentèle des cimes noires du jardin. Le bleu nuit profond du ciel et ses étoiles répondaient immobile à ce frénétique balai.

Ils contournèrent avec précaution pour ne pas tomber les grandes racines et entrèrent dans la maison. Une petite flamme dansait encore dans la cheminée éclairant de façon aléatoire la petite pièce plongée dans les ténèbres La femme prit une tige de boit et la plongea dans cette danseuse erratique. La petite flamme qu’elle en sortit lui servit à allumer l’extrémité de deux tiges de cire blanche apportant d’autres points de vie dans la chaumière. Ils passèrent rapidement à table sous ces lueurs vibrantes au grès des courants d’airs. Un assemblage de végétaux, une nouvelle tranche de ce qu’elle avait appelé « pain » composa le principal du dîner. Ils échangèrent ensuite leurs avis sur cette journée, les découvertes et Rentlau reçu sans réserve aucune toutes les réponses à ses questions. La lune était déjà haute éclairant par des rayons blancs et froids l’intérieur proche des fenêtres. Son hôte invita le jeune visiteur à aller se coucher. Demain était prévu la marche du retour. Il lui faudrait avoir reconstitué ses réserves pour enregistrer les chemins, les codes et les mots destinés aux plantes du passage. Elle lui rappela que cela était essentiel s’il ne voulait pas déambuler pendant des jours sans trouver le chemin, voir se perdre sans espoir de retour.

- « Au delà de tout ce que nous avons vu et découvert aujourd’hui, il faut comprendre que la nature à un langage, des obligations et des règles auxquelles il ne faut pas déroger. La première est de la respecter comme ton égale. Pour cela il faut rester à l’écoute, observer et surtout ne pas hésiter à dialoguer. Il fait savoir que les plates ont un langage et chaque espèce possède son propre mode d’expression. Pour partir d’ici et revenir si besoin était je vais t’apprendre le minimum nécessaire. Pour le reste tu devras le découvrir par toi-même. C’est le meilleur moyen de découvrir et de comprendre les choses au plus profond. »

Ils partirent alors et Rentlau resta silencieux. Tout ce discourt lui paru un peu farfelu mais il voulait rentrer chez lui. Sa mère lui manquait, sa maison et surtout son jardin. C’était sa zone de confiance et le quitter aussi longtemps malgré les découvertes qu’il fit, l’absence, l’incitait à renter. Ils quittèrent l’arc de troncs, le vieil arbre et la magie du jardin pour l’ombre quasi nocturne de la forêt profonde. Très vite il perdit ses repères mais aidé de la vieille dame servait à chaque instant de fil d’Ariane. Quelques rayons perçaient la canopée apportant des reflets d’émeraudes et toute une déclinaison de verts. Au dessus le ciel devait être limpide, exsangue de nuages.

Le parcourt lui paru plus court qu’à l’allée. Très vite et malgré les discutions, les explications incessante de sa guide, la nuit végétale se fit douce clarté. De clarté à une lumière grandissante il retrouva ses espaces de découvertes, son terrain de jeu. La forêt s’ouvrit enfin face au village et à la maison de sa mère, à son « chez lui ». Il prit une grande bouffé d’air devenu lourde et sèche. L’humidité protégée par les cimes de feuilles avait disparu. Les champs s’ouvraient au soleil du début d’été. La veille dame resta dans l’ombre et lui tendit un sac.

 

-" Voici un sac contenant des graines de certaines plantes dont nous avons parlées. Si tu as bien retenu nos discours tu devrais pouvoir les faire grandir et naître. Une fois apprivoisées, tu auras libre court pour ton imagination et ta créativité. Mais attention, mêler des plantes s’est mélanger leurs qualités comme leurs défauts. Il en va de même à chaque rencontre que tu feras. A bientôt. Tu connais le chemin, viens quand il te plaira, mais n’oublie pas de te présenter à chaque fois que tu souhaiteras pénétrer la forêt. Elle te laissera ainsi passer. Les arbres parlent entre eux, maintenant tu le sais. "

-"Merci pour tout et surtout pour ces graines et tout ce que j’ai pu découvrir. Mon jardin va pouvoir grandir et devenir un point de rencontre. Merci ".

Sur ces mots le jeune garçon sorti complètement de la forêt, poussa la petite porte, jeta un regard sur son jardin et entra chez lui. Sa mère l’attendait avec une surprise. Un visiteur ou au plus juste, une personne inattendue dont leurs regards ne s’étaient pas croisés depuis longtemps. Elle avait grandit et lui aussi. Mais ces yeux lui parurent plus beaux que de ses souvenirs, encore plus mystérieux et profonds.

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